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(CAPH) Budget voté par une très large majorité malgré de vives tensions

Le vote du budget primitif 2025, des taux de fiscalité, et du Pacte de Solidarité communautaire, était très attendu. Pour ces trois délibérations, ce vote largement majoritaire ne laisse pas place à un doute sur le partage de la ligne politique, mais une nouvelle page des tensions entre Eric Renaud et les élus communautaires de La Porte du Hainaut a été écrite.

En propos liminaire, Le Président de La Porte du Hainaut a mis en exergue la décision du Tribunal Administratif de Lille du 19 décembre 2024. En effet, cette dernière « a débouté un recours, initié par 7 entreprises de l’Amandinois, en contentieux fiscal contre la TEOM, ni sur son taux, ni sur son existence (jugement du TA de Lille). Le titre de recettes, émis en septembre 2020, a donc une base légale même si la délibération a été annulée en mars 2024 sur la forme ». Ensuite, considérant que le risque de contentieux fiscal est éloigné, Aymeric Robin annonce « la reprise de la provision de 16 millions d’euros (sur le budget 2021) », nous y reviendrons !

Bien sûr, le budget final de cette intercommunalité est conditionné au vote du budget national et par suite de la contrainte budgétaire sur les collectivités locales et territoriales. A cet effet, François Bayrou a indiqué que l’effort de réduction du déficit public serait de 2,2 milliards pour les collectivités publiques, contre 5 milliards initialement prévu par le gouvernement Michel Barnier, mais ce chiffre de 2,2 milliards était à ce stade au Sénat avant la dissolution. En clair, quel sera l’impact en chiffres pour les collectivités publiques du Valenciennois ? Le Président de la Porte du Hainaut explique un budget avisé et responsable : « Nous avons imaginé le pire, les dépenses probables et les recettes contraintes ».

Une reprise de provision contestée… !

Comme première délibération, l’assemblée communautaire a voté une subvention de 10 000 euros (5 000 euros pour la Croix-Rouge et 5 000 euros pour la Protection Civile) en faveur de Mayotte et surtout de la population mahoraise.

L’assemblée plénière devait voter 4 taux, CFE (Entreprises) de 31,13%, de la TFPNB (Taxe foncière non bâties) de 3,28%, THRS (Taxe d’Habitation résidences secondaires) à 11,71%, et la TEOM en vigueur sur la CPA à hauteur de 14,58%. 

Si les 3 premiers taux n’ont pas évolué depuis le début du mandat, la TEOM a été votée au même taux que 2024. Sur cette donnée, le débat est revenu sur la reprise de provision, une obligation légale incontournable dès lors qu’un contentieux existe et reprise comme évoqué ci-dessus. Cette somme de 16 millions d’euros sera répartie à travers une répartition double, 10 millions d’euros dans « un booster en faveur de chaque collectivité locale basé sur 2 critères, par habitant et par un système de péréquation. Cette somme pourra être utilisée pour abonder à un projet d’investissement voire du fonctionnement. Par contre, 6 millions seront fléchés vers le Budget Général », indique Jean-François Delattre, le vice-président aux finances, à l’occasion du budget. 

Sur ce taux de la TEOM, Eric Renaud insiste sur l’impossibilité « d’une reprise de la provision, car le risque est réel. L’ordonnancement de paiement sera prononcé prochainement par le Tribunal administratif de Lille, vous serez obligé de rembourser (la TEOM 2021) ». Ce denier élude rapidement le résultat du Tribunal de Lille (favorable à la CAPH) concernant le contentieux des entreprises, alors qu’il s’appuyait dessus dans les épisodes précédents… sans doute un tournant sur le fond.  A ce titre, Président de la Porte du Hainaut rappelle « que depuis 2019, une délibération fiscale votée est automatique même si cette dernière est sanctionnée sur un vice de forme a posteriori ».

Le débat budgétaire

Annie Denis, André Desmedt interviennent sur des cas isolés comme celui des garages, non reliés à une habitation, voire une chapelle, etc., tous éligibles à la TEOM. Visiblement, il y a un défaut dans la cuirasse et une proposition de loi modificative est en ce moment au Sénat. « La TEOM devait être connectée à l’habitat. Actuellement, elle est inégalitaire. Ensuite, le coût en 2001 était de 11 millions d’euros (avec une Taxe Professionnelle) et aujourd’hui de 20 millions d’euros (sans Taxe Professionnelle depuis 2010) », précise Aymeric Robin.

Concernant ce débat, le maire de Lieu-St-Amand, Jean-Michel Denhez, évoque sa lassitude sur la contestation de la TEOM. « Depuis 2001, personne ne s’est ému des communes payant la TEOM. Pour ma commune, c’est 70 000 euros depuis 20 ans… ! A cette date, Eric Renaud était vice-président aux finances, il n’a pas bougé pour nous soutenir. Je suis fatigué de ce débat. Oui, c’est normal de mettre tout le monde à niveau. »

L’intéressé mis en cause répond sur ce point précis : « A l’époque, nous pouvions agir directement pour les communes, mais pas sur celles déjà dans un syndicat mixe responsable de la collecte des ordures ménagères ». Bien sûr, l’historique débat avec la CCRVS est revenu sur la table, où 7 communes ont rejoint la CAPH au 1er janvier 2014, avec le Président de la Commission des Finances (Eric Renaud) en mode militant pour une TEOM à zéro pour ces collectivités locales. « On a fait un cadeau à la CCRVS », ajoute  Jean-Michel Denhez. 

Pour Pascal Jean, maire de Neuville-sur-Escaut, la réparation était inévitable : « C’était une injustice depuis 2001, 26 communes payaient la TEOM. Ma commune payait 128 000 € par an depuis 2001. Aujourd’hui, la prestation du SIAVED est de qualité pour la collecte des ordures ménagères, l’amiante… Cela se paye un service ! »

Pour la ville de Saint-Amand, Patrick Dufour rappelle, suite à la décision du TA de Lille en mars 2020, que « la CAPH avait deux choix. Une TEOM 2025 à zéro en compensation de la TEOM 2021 à rembourser où un remboursement aux contribuables voire aux communes des 16 millions d’euros. » La cité thermale reste accrochée à cette TEOM à zéro contre vents et marées. Ce dernier contestera aussi la répartition de la DSC (Dotation de Solidarité Communautaire) avec un retour de 800 000 euros pour St Amand pour une sortie de 2 millions d’euros. En digression, mais si peu, à force de contester toute balance défavorable à la commune, cela ramène inévitablement le sujet de la taxe jeton et bouchon sur le tapis. « Je suis fier que la taxe sur la centrale EDF de Bouchain soit versée au pot communautaire », souligne le maire de Bouchain, Ludovic Zientek, sans oublier d’égratigner cette exception. D’évidence, cette singularité fiscale, valable en France pour toutes les cités thermales, ne pourra survivre à l’heure d’une urgence de gestion de la dette publique globale. Avant où après les élections municipales, ce sujet reviendra sur la table au Sénat d’abord et le lobbying historique pour maintenir cette singularité paraîtra aussi désuet que l’encrier sur la table d’école.

Eric Renaud propose, en compensation d’une provision à maintenir de 16 millions d’euros, de « supprimer l’investissement pour le prochain hôtel communautaire de 18 millions d’euros sur la zone du Plouy à Raismes. Vous pourriez affecter 12 millions d’euros à un fonds, comme Booster, pour les communes. »

De son côté, Jean-Michel Michalak, le maire de Sars-et-Rosières, revendique un fonds plancher minimum (DSC) de 30 000 euros pour les communes rurales. Ensuite, le minimum de 20 000 euros pour déclencher cette solidarité doit se modifier. « Sur ma commune, j’ai eu des travaux de sécurité pour l’école communale pour un montant de 13 000 euros. Je n’ai donc pas pu bénéficier de ce fonds et j’ai demandé le soutien du Conseil départemental du nord », explique l’édile. 

Jean-François Delattre rappelle que « nous avons constaté des dérives avec l’achat de tables, chaises, etc., et pas des investissements sur des équipements d’où ce minimum de 20 000 euros concernant ce seuil de déclenchement de ce fonds de concours ». 

De son côté, Christophe Vanhersecker continue à militer pour la TEOM incitative visant à responsabiliser les foyers et à récompenser les citoyens plus vertueux dans le tri de leurs déchets. A ce titre, Anne-Lise Dufour est en charge d’un groupe de réflexion sur le sujet et présentera en juin prochain un rendu. Toutefois, Charles Lemoine, le Président du SIAVED, précise qu’avec « 7 EPCI membres du SIAVED, et des pratiques différentes, cette piste est très compliquée à mettre en oeuvre. » 

Débat polémique…

Déjà abordé durant le ROB, Eric Renaud a aligné des mots relatifs à la mise en cause des élus communautaires, de l’exécutif, et de sa présidence concernant le choix, désormais officiel, de reprise de la provision de 16 millions d’euros. « Cette recette est d’une insincérité flagrante. Votre reprise de provision illégale et cette DSC (Dotation de Solidarité Communautaire) pose question. Votre budget est en trompe l’oeil. La réalité est que La Porte du Hainaut est dans une situation financière très critique. Vous subissez l’effet ciseau qui était pourtant prévisible. Je vais saisir le Prefet de Région et initier un recours devant le Procureur de la République », commente l’élu communautaire de Saint-Amand-les-Eaux. Plus globalement, certains propos ont franchi une étape, dans la sémantique, concernant la mise en cause des élus communautaires favorables à cette TEOM et par suite celle de la reprise de provision de 16 million d’euros.

« Il faut que ce débat s’arrête (sur la TEOM) », Jean-Michel Denhez ; « ça suffit », Pascal Jean ; « Les mots ont un sens… détournement de fonds publics », commente Arnaud Bavay, le maire d’Hordain ; « nous ne sommes pas des escrocs. Je suis Robin », ajoute Ludovic Zientek ; « je suis atterré », poursuit Patrick Triffi, élu de la majorité à Raismes. Sur ces allégations verbales, le Président de la CAPH dit « ne pas se sentir attaqué à titre personnel, mais l’institution CAPH »… et Eric Renaud rebondit sur cette réponse « vous avez raison M. Le Président », comme si une prise de conscience sur la portée personnelle du verbe s’opérait en direct ! Le ton monte en même temps que l’isolement de ce dernier à travers 11 abstentions et un vote contre le Budget Primitif 2025 ; un résultat de vote très différent à 2021 avec la mise en oeuvre de la TEOM pour la première fois sur cette communauté d’agglomération. 

Pour le reste, la discussion du BP est dans la droite ligne du ROB avec une EPCI encore sous 3 an de capacité de désendettement, avec un stock de 89 millions d’euros de dettes. « Nous avons réduit durant les 3 dernières années notre dette globale autour de 100 millions d’euros en 2021 », précise Jean-François Delattre. Les dépenses en faveur des équipements, inscrits au PPI 2025, sont instructives (tableau ci-dessous). On observe que l’habitat, sa rénovation, son aménagement, voire sa construction, prend une place majeure dans la dépense publique de la CAPH ( presque 30 millions d’euros).

Sur les dépenses réelles de fonctionnement, la part de la collectivité territoriale vers les politiques publiques s’élève à 114 millions d’euros sur 140 millions au total (hausse de 11%). A ce titre, l’enveloppe exceptionnelle « Booster » vient s’ajouter à l’enveloppe communautaire de la DSC, soit 19,8 millions d’euros en 2025 contre 9.185.000 en 2024.

Sur les dépenses d’investissements, sur les 77 millions d’euros engagés, 65 millions d’euros sont fléchés pour financer les politiques publiques. 

Les cas particuliers

Fin 2024, trois communes de la CAPH ont reçu un avis des contributions publiques désagréables avec une réduction drastique de la taxe foncière à percevoir pour des raisons techniques ou de contentieux. La commune d’Hordain était concernée pour un montant de 270 000 euros, une déflagration budgétaire. Parfois, un maire reçoit une bonne nouvelle. En effet, un décret du 03 janvier 2025 (https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000050949978) permet à cette commune de récupérer, suivant un calendrier précis, l’intégralité de cette somme. Par contre, il fallait répondre à 2 critères fiscaux clairs en lien avec la portée de la somme sur le montant global de la Taxe Foncière perçue. 

Pour Saint-Amand-les-Eaux, la claque fiscale était encore plus rude suite à un contentieux avec les finances publiques, plus d’un million d’euros en moins pour la taxe foncière. Pour cette dernière, Sylvie Wiart, adjointe aux finances de la cité thermale, contactée par ailleurs, a indiqué que « les services de la commune examinent les deux critères évoqués dans ce décret du 03 janvier dernier. A cette heure, je ne me prononce pas sur ce remboursement. Nous vérifions notre éligibilité ! ». La réponse sera apportée, sans aucun doute, à l’occasion du prochain vote du budget en février 2025 sur la cité thermale.

En bref :

Les syndicats en charge de la gestion des cours d’eau, et donc de la taxe GEMAPI, vont venir échanger avec l’hémicycle communautaire. Un bon moyen de mettre des mots sur une mission essentielle, mais bien difficile à expliquer aux administrés.

L’attitude du SDIS à l’égard de ce territoire a suscité une levée de boucliers tous azimuts. Le sujet, lancé par le sénateur Joshua Hochart, a été repris par le député Salvatore Castiglione, et le Président de la CAPH, il marque l’incompréhension dans le Hainaut sur le service à la population apporté par le SDIS. Bien sûr, cette contestation n’est pas dirigée contre les pompiers, mais contre la gouvernance du Conseil départemental du Nord. Les mauvaises langues diront que depuis des décennies, voire le début de la 5ème République, la politisation de l’arbitrage politique n’a jamais été aussi flagrant que sous la houlette de Christian Poiret. 

La Porte du Hainaut relance son soutien à la mobilité douce avec une nouvelle enveloppe de 200 000 euros. Cette fois, en plus du soutien financier précédent, l’accent est porté sur la réparation de son vélo avec le doublement de la somme allouée, mais également sur les accessoires pour une bonne pratique en toute sécurité (affiche ci-dessus).

Daniel Carlier

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