(Petite-Forêt) Au delà de l’altérité du handicap !
Au détour de l’évolution du pôle handicap sur Petite-Forêt, le sujet transversal de l’accueil des enfants déficients en milieu scolaire et hors scolaire demeure central pour une commune. Dans cette optique, Petite-Forêt avance sur cette thématique de l’accueil avec une exigence structurée, conforme aux obligations de la CAF, mais surtout en phase avec des choix politiques assumés. La prise de poste d’un nouveau chef de service du Pôle Handicap, la semaine dernière, constitue une belle illustration de cette volonté politique locale.
Bernard Siemieniecki : « La bonne volonté ne suffit pas ! »
En propos liminaire, il est important de situer le contexte afin de mieux comprendre le chemin parcouru, mais également l’immense reste à charge collective. En l’espèce, ce reportage, cette conversation, cet échange n’aurait même pas eu lieu au 20ème siècle. « L’inclusion scolaire en milieu ordinaire était très difficile fin des années 80 », lâche Arlette Van de Poel, adjointe enfance/jeunesse sur le commune de Petite-Forêt. Un petit commentaire pour mettre en exergue la possibilité d’un accueil dans les centres de loisirs s’avérait encore plus lunaire il y a tout juste 25 ans, car la ligne de conduite était souvent un repli des parents d’un enfant handicapé, faute de solutions locales ou de proximité, une non prise en compte du sujet par les collectivités locales, faute de compétences, mais surtout à travers une carence de conscience citoyenne. Notre état d’esprit collectif a pris une nouvelle dimension à travers la 1ère loi d’ampleur, en février 2005, relative aux personnes en situation de handicap. La conscience des collectivités locales s’émancipe donc peu à peu sur cet item, avec une réalité sur le terrain très hétérogène, et Petite-Forêt fait partie de ces communes en progrès notable. Qu’on se le dise, l’acceptation de la différence s’est traduite en France, et dans bien d’autres pays latins, par la loi, pas par une bonté d’âme, car ce sujet demeurait un dossier secondaire pour les communes, toute obédience confondue, tout simplement !
Arrivé en 2014 au sein de la commune de Petite-Forêt, Bernard Siemieniecki, le Directeur du service enfance/jeunesse, et par suite du pôle handicap a vécu de l’intérieur cette évolution. « Le pôle handicap a été lancé par l’ancien maire, Marc Bury, en 2012 à la suite d’une demande d’un parent pour son enfant », commente-t-il. Comme souvent, la demande génère le besoin et le mérite à l’époque d’une commune était à minima de prendre en compte le sujet sans se décharger sur le voisin. « Ensuite, grâce à une agent de la commune, versée en psycho, nous avons jeté les bases d’une coordination plus globale de l’accueil des enfants en situation de handicap sur Petite-Forêt », poursuit-il.
Toutefois, l’évidence éclate face à la complexité de cet accueil spécifique. « La bonne volonté ne suffit pas ! », commente Bernard Siemieniecki. « Un BAFA n’a pas la compétence pour répondre à toutes les situations, il est totalement désarmé face à des situations de crises, des besoins spécifiques… », déclare Sandrine Gombert, l’édile de la commune.
1 enfant handicapé, 1 accompagnant…, et un nouveau chef de service !
C’est pourquoi, chemin faisant, ce service dédié s’est organisé, il a pris une nouvelle dimension avec le 1er mandat de la nouvelle majorité municipale sous la houlette du nouveau maire. « Actuellement, nous accueillons 16 enfants en situation de handicap. Bien sûr, ils ne sont pas présents tous en même temps. Quelques-uns le mercredi, 8 à 10 durant les petites vacances, et 16 répartis entre juillet et août, et d’autant plus que de nombreux centres de loisirs sont fermés au mois d’août dans le Valenciennois. Notre ligne de conduite est un enfant en situation de handicap, un accompagnant, sans altérer en aucune façon le service aux autres enfants », précise Bernard Siemieniecki.
Pour muscler plus encore ce service, la commune a choisi de recruter à temps plein Guillaume Leprêtre, un éducateur spécialisé en provenance de l’IME Malécot à Saint-Amand-les-Eaux durant 15 ans. Il a rejoint l’équipe sur Petite-Forêt la semaine du 17 juillet 2023, l’intéressé veut relever un nouveau challenge au sein de cette collectivité locale.
Aujourd’hui, en sus du nouveau référent handicap, 10 vacataires (équivalent 2 ETP) répondent aux besoins des activités ludiques, culturelles, et sportives où l’enfant en situation de handicap « est en mode inclusif. C’est important. Il ne peut pas forcément participer à toutes les activités, mais le plus souvent il participe », explique Arlette Van De Poel, adjointe au Conseil municipal de Petite Forêt, mais également professeur des écoles depuis 40 ans au sein de l’école Saint-Exupéry.
« Accueillir les enfants concernés dans les meilleures conditions », Sandrine Gombert
Evidemment, rien n’existe sans financement sonnant et trébuchant. A ce titre, la CAF est comme souvent le déclencheur sur le sujet. « Je remercie la CAF pour son soutien financier pour ce service à la population », indique Bernard Siemieniecki. Concrètement, la CAF verse 30 000 par an et la commune 20 000 € annuel pour la mise en musique de cet accueil particulier.
Pour autant, la qualité du service proposé demeure le fil conducteur. « Nous voulons accueillir les enfants concernés dans les meilleures conditions », précise Sandrine Gombert. La jauge est par conséquent très fine et à respecter, mais nous sommes bien assistés par « les services de la CAF afin de coller aux besoins de Petite-Forêt, car les jeunes participants sont tous enregistrés auprès de la MDPH (Maison Départementale pour les Personnes Handicapées) », précise indique Bernard Siemieniecki.
La limite tient, outre la capacité d’accueil, à la nature du handicap. « Nous ne pouvons pas accueillir les jeunes avec une agressivité excessive, des troubles du comportement trop importants, etc., voire un polyhandicap trop lourd », confirme Guillaume Leprêtre.
Des compétences… obligatoires !
Cet accompagnement des enfants en situation de handicap est à mettre en parallèle avec la fameuse départementalisation de la CAF. Il y a peu encore, la Caisse d’Allocations Familiales contractait en « face to face » avec la commune. Dorénavant, la CAF signe avec la communauté d’agglomération une convention avec des objectifs très clairs et (re)discute commune par commune des résultats à atteindre, c’est une révolution ! L’idée pour cette institution indissociable du lien étroit entre une collectivité locale et les familles des administrés réside en quelques mots…, la montée en compétences. En résumé, pour l’accueil des enfants en général, les agents compétents et diplômés sont obligatoires. Ce nouvel adage constitue un problème de taille à l’échelle d’un pays comptant encore 34 500 communes, une singularité européenne d’un pays agricole et centralisé historiquement.
En toute logique, les demandes d’accueil des enfants en situation de handicap, hors Petite-Forêt, sont une réalité. Certes, la priorité est aux francforésiens, mais les demandes des familles dans les villes du Hainaut n’est pas exclue.
Pas de politique territoriale… !
Si la CAF agit au niveau de la coordination territoriale, il est évident que cela ne répond pas totalement aux besoins des familles en la matière. Si les communes s’organisent peu à peu avec des disparités criantes, il n’en demeure pas moins que nous n’avons pas de vice-présidence en charge du handicap, ni sur la CAVM, ni sur la CAPH, car cela reste une affaire communale, mais limitée.
En effet, par quelle fatalité la coordination entre 82 communes est possible sur des sujets comme la mobilité, la lutte contre les violences sexistes et sexuelles, mais pas sur la disponibilité d’accueil des enfants en situation de handicap dans les différents centre de loisirs d’un territoire. Chacun dans son coin, et vogue le navire du handicap ! Pourtant, ce sujet mériterait un dépassement des clivages politiques afin de répondre aux besoins d’une population d’une extrême densité. On rappelle que le nombre de personnes concernées est monstrueux, 10% de la population française (personnes handicapés + aidants), donc 36 000 personnes sur le Valenciennois… ! La réponse, ce n’est pas la compétence d’une intercommunalité reflète parfaitement l’absence française en la matière, le « mindset » comme disant les anglo-saxons, est aux antipodes d’un sujet essentiel aux liens familiaux, en passant avec de l’emploi non délocalisable à travers la construction de structures adaptées, voire des financements des espaces d’accueil, il n’y a pas que les GigaFactorys pour changer le quotidien d’une famille… !
Daniel Carlier