« Je te crois », mais on verra ça demain… !
A quelques mètres de la flèche métallique de Valenciennes sur la Place d’Armes, symbolisant l’ancien beffroi, l’association « Nous Toutes 59 Valenciennois » a organisé la 3ème édition d’un message libérateur. Il est simple, direct, compréhensible par toutes et tous, « Je te crois » ! Trois mots associés dont la portée est capitale dans le processus d’une libération de la parole face aux violences sexistes et sexuelles.
Emilie Van Ryckeghem : « 6 jeunes femmes sur 10 victimes d’un viol ou d’une agression sexuelle »
La communication, c’est la répétition soulignent les professionnels en la matière. En l’occurrence, le matraquage de ce message peut sauver des vies, car « on ne fait pas assez. Les mesures prises durant le dernier mandat présidentiel sont de l’ordre du bricolage. Nous n’avons pas suffisamment de moyens financiers pour la prévention, il faut travailler en profondeur dans les milieux scolaires, au sein des entreprises, etc., afin de porter cette parole libérée », commente Betty Rygielski, l’ancienne présidente de l’association, aujourd’hui présidente d’honneur. En effet, l’Assemblée générale du mois de juillet 2022 a élu Emilie Van Ryckeghem comme la nouvelle présidente de l’association. Première réforme… « nous allons modifier le nom de l’association pour devenir -Nous Toutes Valenciennes », commente la Présidente. Tout est à prendre en compte pour une meilleure lisibilité.
« Il faut aider les victimes », Betty Rygielski
La sensibilisation dans toutes les couches sociales de la parole de la victime, majeure ou mineure, passe par des étapes. Même l’arrivée d’une nouvelle génération ne constitue le gage absolu d’une meilleure prise de conscience. « Il faut aider les victimes. Nous n’y arriverons pas toutes seules. Je viens de mettre une vidéo très suivie sur le « Devoir conjugal » et c’est un déferlement de commentaires », ajoute Betty Rygielski.
Devant les membres de l’association brandissant un message vécu, Emilie Van Ryckeghem prend la parole pour (re)placer l’hôtel de ville au milieu du village. « La parole des victimes de violences sexistes et sexuelles n’est pas entendue par la justice, la police, les voisins, la famille… et la victime doit se résoudre (dans l’hypothèse où elle parle) à entendre des classements sans suite, des acquittements, des agresseurs (présumés) relaxés ! La charge de la culpabilité est très importante sur les épaules de la victime », déclare Emilie Van Ryckeghem.
Quelques chiffres donnent toujours le niveau de la partition, les notes sonnent comme un orchestre de cor de chasse. « Entre 2011 et 2018, 94 000 femmes entre 18 et 75 ans indiquent avoir subi un viol ou une agression sexuelle ; six jeunes femmes sur dix victimes, au moins une fois, d’un viol ou d’une agression sexuelle. Enfin, un enfant meurt tous les cinq jours sous les coups, 160 000 enfants sont victimes d’un inceste par an », lance Emilie Van Ryckeghem.
Des témoignages poignants…
Le principe de ces messages portés par les victimes en public repose déjà sur un grand courage des participantes. Sur chaque panneau s’inscrit une tranche de vie, parfois toute une existence, un moment salvateur pour se reconstruire. De la même manière que la parole peut se libérer 25 ans plus tard, la reconstruction peut s’envisager sur le temps long.
A cette lecture glaçante est venue s’ajouter la parole à travers des témoignages de victimes présentes ou pas. Les récits vous paralysent tant les dégâts physiques et psychologiques sont profonds. Toutefois, coucher sur le papier où derrière un écran ce ressenti d’une vie constitue une victoire pour chacune, c’est un premier pas indispensable. Bravo à elles !
La prochaine manifestation rejoint la marche, au niveau national, du collectif « Nous Toutes » au mois de novembre.
Daniel Carlier