(APEI) Georges Maillot : « Ils sont formidables, mais ils souffrent ! »
Comme l’ensemble des Françaises et des Français, les membres de l’APEI du Valenciennois vivent difficilement cette pandémie qui n’en finit pas. Pour autant, l’adaptabilité aux conditions sanitaires, la continuité d’une gestion au quotidien, la poursuite et la candidature aux nouveaux projets demeurent indispensables pour une institution au soutien des personnes en situation de handicap intellectuel. Reportage au sein de la Ferme thérapeutique, sur Saint-Amand-les-Eaux, dont les travaux en cours sont le symbole d’une vie qui continue (Visuel de gauche à droite avec Georges Maillot, David Leclercq, Pascal Defaut, Sophie Maquinghen, et Coralie Mortagne).
Travaux sur la Ferme thérapeutique… en 2021 !
Locataire depuis 1993 de cet ancien corps de ferme rue Ernest Couteaux à Saint-Amand-les-Eaux, cette ferme thérapeutique accueille 16 résidents sur ce site plus 5 accueil de jour. Aujourd’hui, le profil de ces permanents adultes, de 34 à 61 ans, est choisi à dessein. « Il est important que les résidents soient stables. Certes, ils ont un trouble psychique, mais ils ne doivent pas perturber le collectif. On vit ensemble 365 jours sur 365. Donc, c’est un public fragile, mais stable ! », explique Sophie Maquinghen, la Directrice de la ferme thérapeutique, de l’IME et du SESSAD à Saint-Amand-les-Eaux.
Les activités sont multiples au sein de cette Ferme thérapeutique « comme l’atelier poterie. Ensuite, nous participons avec nos résidents à beaucoup d’activités extérieures comme la piscine (hors Covid), le sport adapté comme à la Gym sur Marly, la ludothèque… Actuellement, nous poursuivons nos activités de plein air », commente Coralie Mortagne, chef de service à la Ferme thérapeutique. Avant l’entame des travaux, l’activité apaisante autour des animaux était aussi une marque de fabrique de cette enceinte. « Dans la nouvelle configuration, nous ne pourrons plus proposer cette activité aux résidents », précise Sophie Maquinghen.
Sur ce bâti ancien, un projet était inscrit dans la convention triennale avec le Conseil départemental du Nord (CPOM/2016). Annoncé à chaque cérémonie des voeux de l’APEI du Valenciennois, il était pourtant à chaque fois différé. Et c’est en pleine pandémie mondiale que ce dossier se débloque, car les travaux d’extension sont en cours. « Sur 732 M2, nous réalisons des nouvelles chambres pour les résidents. Il n’y aura plus de chambres à l’étage. De plus, nous bénéficions de deux places supplémentaires, nous passons de 16 places à 18. Ces travaux comprennent également une rénovation de l’existant sur 300 M2. Ce chantier devrait aboutir en septembre 2021 », précise Pascal Defaut, le Directeur des services techniques pour l’APEI du Valenciennois.
« Aucun cluster sur un des sites de l’association », David Leclercq
A la sortie du 1er confinement, nous avions vu dans un reportage précédent les choix de l’association https://www.va-infos.fr/2020/06/10/du-confinement-au-deconfinement-avec-lapei-du-valenciennois/ ! La suite de l’année 2020 devait confirmer cette gestion sanitaire où « l’APEI a été désignée comme organisme gestionnaire des masques et autres matériels de protection, près de 80 000 masques par semaine à distribuer dans les EHPAD, résidence autonomie, etc. », explique Pascal Defaut. « C’est pour nous également une marque de reconnaissance », ajoute David Leclercq, le Directeur général de l’APEI du Valenciennois. Bien sûr, la grande différence entre le 1er confinement et le deuxième est « qu’aucune structure n’a été fermée au mois de novembre. Par contre, nous avons adopté toutes les mesures barrières avec l’installation de plexis dès le 1er confinement en plus des masques, plus une politique de test massif et hebdomadaire. Enfin, pour harmoniser les décisions, nous avons mis en place une personne responsable d’astreinte 24H/24 et 7J/7 », commente David Leclercq.
A ce stade, il n’y a pas « eu de forme grave de la Covid. Aucun cluster sur un des sites de l’association n’a été révélé même si bien sûr nous avons eu des cas positifs, mais nous avons été très réactifs. Dans ce cadre, à chaque fois, nous avons isolé la personne en question et son entourage de façon très large. C’est une explication de ce résultat même si vous avez toujours une part de chance », commente David Leclercq. « Pour les résidents pour lesquels il n’était pas possible de tester, nous prenions des mesures barrières supplémentaires », précise Sophie Maquinghen.
D’un point de vue global sur le comportement des membres de l’APEI, le Président de l’APEI du Valenciennois, Georges Maillot, met en exergue un comportement exemplaire. « Comme nous tous, ils n’en peuvent plus de ces contraintes sanitaires. Par contre, ils sont formidables à travers leur comportement parfois plus disciplinés que nous-mêmes, mais ils souffrent ! ».
Le temps de la vaccination
Pour conserver une dynamique, le temps de la vaccination fait partie du management. « La vaccination repose sur le droit commun, elle est sur la base du volontariat. Nos encadrants sont prioritaires, car au contact d’un public fragile. D’ailleurs, je remercie le Centre de vaccination Jean Mineur à Valenciennes pour être venu sur le foyer d’Hergnies pour vacciner, et celui de la cité thermale sur le site de Saint-Amand. Ce fut très falicitateur tout en évitant des angoisses pour les résidents », déclare David Leclercq.
L’APEI du Valenciennois sans temps d’arrêt
Même en temps sanitaire, avec 1 700 membres au sein de l’APEI du Valenciennois, 650 travailleurs dans les ESAT, 800 encadrants, l’APEI du Valenciennois voulait conserver une dynamique de projets. « Nous avons fait avancer nos dossiers avec l’ARS Hauts-de-France et le Conseil départemental du Nord ; dix places de plus au SESSAD Escaut depuis octobre 2020, deux places supplémentaires à la ferme thérapeutique financés par l’ARS et le Conseil départemental, 10 places de plus sur Bruay-sur-l’Escaut. On observe des simplifications dans l’administration des dossiers, une réelle réactivité de nos organismes de tutelle. Au niveau des techniciens que ce soit au sein de l’ARS ou du Conseil départemental, nous avons un relais de proximité. Nous avons eu cette chance là durant les deux confinements », explique David Leclercq.
La Belgique
On n’oublie presque que depuis des décennies les personnes en situation de handicap intellectuel ont potentiellement un accueil en Belgique avec la bénédiction de la CPAM. L’évolution notable est qu’aujourd’hui « nous avons des places en IME pour les moins de 20 ans, mais le problème existe encore pour les adultes », commente Sophie Maquinghen.
En 2021, nous sommes dans un entre-deux. D’un coté, les organismes de tutelle et le gouvernement prennent conscience de ce phénomène. « Nous répondons à plusieurs appels à projets dans ce sens. Il y a une volonté institutionnelle de trouver une solution pour un parcours de vie en France », commente David Leclercq. Cette évolution publique vise « à interrompre le flux de jeunes adultes partants pour la Belgique », ajoute Sophie Maquinghen.
En chiffres, 1000 places sont programmées pour le Grand Est, l’île de France, et les Hauts-de-France, mais « ce n’est pas encore suffisant », lance Georges Maillot. En effet, la réalité d’un XXIème siècle réside dans un vieillissement de ce public, une durée de vie nettement accrue avec mécaniquement la disparition potentielle de la famille, les aidants, et c’est là que la catastrophe arrive.
Ces réflexions sont issues en partie du rapport « Piveteau » sur le thème de la prise « en charge de personnes handicapées dans des établissements situés en dehors du territoire national ». Le détonateur sera comme pour le Plan de Relance une volonté politique sans faille quoi qu’il en coûte afin de proposer à toutes les familles françaises une solution. A minima, tout un mandat présidentiel avec un budget annuel au niveau permettrait seulement une diminution significative des françaises et français avec un handicap cognitif en Belgique. Plus qu’une intention politique, c’est un choix budgétaire pur et simple !
Daniel Carlier