Territoire

Laurent Rigaud : « Il faut sécuriser le revenu des professionnels de proximité »

Suite à l’annonce du Premier ministre Jean Castex, les réactions des commerçants et artisans sont pléthoriques, et désespérées. En tout état de cause, il faut oublier le mot déconfinement dans les quelques mois à venir, juste une liberté surveillée ! Sur les Hauts-de-France, Laurent Rigaud, président de la Chambre des Métiers et de l’Artisanat régionale, alerte le gouvernement sur les conséquences potentielles de ces décisions économiquement mortifères.

Laurent Rigaud : « La prise en charge des loyers va s’imposer aux acteurs publics ! »

Le premier sentiment du Président de la CMA Hauts-de-France va vers les entreprises dites « non essentielles » : « Je pense à mes collègues qui sont encore fermés, ceux qui subissent. C’est une catastrophe ! J’ai des collèges au bout du rouleau. Honnêtement, je ne m’attendais pas à une réouverture, mais avec des soutiens financiers plus forts. Bien sûr, on comprend l’urgence sanitaire ».

En effet, les mois de novembre et de décembre sont les deux piliers d’une fin d’année réussie. Avec un mois de novembre fermé pour moules activités, une partie du bénéfice de fin d’année s’est envolé. Ce dernier est pourtant nécessaire pour faire face aux charges du début d’année, et notamment au décalage d’un crédit, des charges sociales, voire du PGE (Prêt Garanti par l’Etat).

« A cette heure, on ne peut plus parler d’une bonne fin d’année, mais de survivre tout simplement. Il apparaît que l’ouverture en décembre serait en mode dégradé, avec un protocole sanitaire encore plus contraignant. Pour certaines, je ne vois pas ce qui pourra être fait de plus. En même temps, on ne peut dire à un coiffeur, vous ne pourrez avoir qu’un seul client dans votre salon en décembre… ! », indique Laurent Rigaud.

« On sait que nous sommes à la fin de quelque chose », Laurent Rigaud

Dans ce cadre contraint, les mesures évoquées par le Gouvernement (fonds de soutien, chômage partiel, etc.) sont reconduites, mais elle sont manifestement insuffisantes. « Il faut sécuriser le revenu des professionnels de proximité à l’instar du chômage partiel pour les salariés. Ils ne peuvent plus concevoir de ne plus percevoir de revenus. Cette mesure serait une 1ère réponse du gouvernement face à la détresse des professionnels de proximité. A ce stade, le fonds de soutien débloqué (seulement) courant décembre, ce n’est pas entendable », commente-t-il.

Les conséquences sur le quotidien des professionnels de terrain seront palpables. «  On sait que nous sommes à la fin de quelque chose. Nous savons qu’une 3ème vague est annoncée en février (sauf vaccin). Cela tue le moral de mes collègues », ajoute-t-il.

L’autre mesure souhaitée par les artisans et commerçants est évidente. A ce titre, Christian Poiret, président de l’agglo du Douaisis, annonce une prise en charge des loyers en novembre (voire plus) des professionnels de proximité, il a fait mouche ! Laurent Rigaud valide cette heureuse initiative. « Comment un artisan ou commerçant peut-il, sans revenu, payer son loyer ? La prise en charge des loyers va s’imposer aux acteurs publics que ce soit l’Etat, la région, l’agglo, voir les communes », précise-t-il.

« Les élus ne peuvent plus nous dire, on n’a pas le droit », Laurent Rigaud

Sur ce dernier point, Laurent Rigaud prévient clairement « les élus ne peuvent plus nous dire, on n’a pas le droit. On m’indiquait que les collectivités locales ne pouvaient pas soutenir les professionnels en direct. A titre d’exemple, la commune de Marc en Baroeul à signer une convention avec la région afin de soutenir les artisans et commerçants de sa commune. Il y a des textes, il faut les changer. C’est un choix politique. Ce qui était impossible avant le Covid-19 est possible aujourd’hui », poursuit Laurent Rigaud.

Il évoque également les modalités d’indemnisation où une collectivité lui signifiait qu’un fonds était ouvert, à disposition des artisans, mais que l’argent était encore là ! « C’est méconnaître les contraintes d’un artisan ou d’un commerçant. Il n’est pas capé pour aller chercher ce type d’aides financières. Il faut que les actions soient concrètes. J’ai dit aux acteurs publics de reflécher sur les loyers, et les revenus des artisans/commerçants. C’est concret ! », assène-t-il.

Les milliards défilent comme sur un manège sans fin de course. La résultante ne fait point de doute, car cette dette publique abyssale sera payée (un jour) par les prochaines générations. « Pour autant, ce qui est essentiel, ce sont les prochaines semaines, les prochains mois », souligne Laurent Rigaud.

« Une vague de liquidation durant le 1er semestre 2021 », Laurent Rigaud

Si au niveau du Ministre délégué, Alain Griset « il fait le job, mais c’est au niveau du Ministre de l’Economie et du 1er Ministre. Par contre, le Gouvernement ne réalise pas l’impact. On nous dit cela va passer. C’est faux, cela ne passera pas, il y aura une vague de liquidation en cascade durant le 1er semestre 2021. Derrière un professionnel qui cesse son activité, il y aura des emplois perdus, des fournisseurs avec des impayés… », commente-t-il.

Il conclut ce propos par un avertissement clair… « il faut faire tout ce qui est possible pour survivre, ne rien regretter. C’est ce je fais au quotidien. Nous faisons remonter les informations pour faire bouger les lignes. Le mouvement des Gilets Jaunes n’a pas été perçu par le Gouvernement. Là, à un moment donné, les professionnels de proximité vont exprimer leur colère, vont se mobiliser, et revendiquer ! », conclut-il.

Chaque jour compte !

Daniel Carlier

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