(Tereos) Seuls les poissons morts ont tout compris (1/3)
Une catastrophe écologique est intervenue dans la nuit du 09 au 10 avril sur le canal de l’Escaut en France, mais également en aval du fleuve international comme en Belgique. Voilà le point de départ d’une pollution constatée. En pleine période de confinement, les réactions furent tardives sur cette pollution…, et les questions demeurent !
(Tereos) Une enquête judiciaire a été ouverte par le Procureur de la République de Cambrai
Le 15 avril 2020, soit 5 jours après l’événement la Commission Internationale de l’Escaut publie ce communiqué : « Dans la nuit 9 avril 2020, la rupture d’une digue d’un bassin de décantation de la sucrerie Tereos à Escaudœuvres a entraîné le déversement d’environ 100 000 m3 d’eau de lavage de betteraves très riche en matière organique sur la commune de Thun-Saint-Martin. En se déversant dans le milieu naturel, ces eaux de lavage ont rapidement saturé le milieu aquatique, plusieurs cours d’eau ont été touchés notamment « la Raperie », « l’Erclin » puis « l’Escaut ». La vague d’eau contaminée a par ailleurs remonté tous les ruisseaux situés en amont du bassin de décantation sur plusieurs centaines de mètres. Des mortalités piscicoles ont été constatées sur les différents cours d’eau jusqu’à la commune de Paillencourt ».
La CIE indique également qu’une enquête judiciaire a été ouverte par le Procureur de la République de Cambrai.
Néanmoins, la pollution n’attend pas les réactions administratives, elle poursuit son oeuvre implacablement. Ainsi, la Wallonie est fortement touchée à travers une population piscicole décimée. Les élus belges réagissent vigoureusement à l’endroit des autorités françaises, notamment dans un article de la La Voix du Nord.
Ensuite, le 20 avril, la Wallonie a envoyé une alerte à ses voisins en aval, la Flandre, Bruxelles capitale et les Pays-Bas, via le SAAE, compte-tenu des faibles teneurs en oxygène relevées en plusieurs stations de mesures. Le 21 avril, c’était au tour de la Flandre d’activer l’alerte. Wallonie et Flandre ont tout mis en oeuvre afin d’éviter une mortalité massive des poissons.
Le 24 avril, le Figaro et Mediapart évoquent un communiqué de presse de l’entreprise Tereos, géant de l’agroalimentaire. L’entreprise explique sa version de cette pollution organique massive. Toutefois, Téreos indique qu’il est «trop tôt pour établir de quelconques liens de causalité». Téreos se défend d’un lien de causalité avec la pollution constatée en Belgique 30 km en aval, mais qu’elle «assumera sa responsabilité si elle venait à être établie.»
Le même jour, le 24 avril, le Préfet de la région des Hauts-de-France, envoie un communiqué à la presse pour indiquer « un incident écologique rapidement signalé par l’entreprise »… « son intervention rapide »… « la DREAL a procédé à des prélèvements »… « une enquête sous l’autorité de la République de Cambrai vise à déterminer les travaux à prévoir ainsi qu’un plan de surveillance ».
« Nous n’acceptons plus cette pseudo fatalité« , Marc Duvivier
Parmi les premiers à réagir durant cette période singulière, où le Covid-19 met sous cloche tout autre communication, l’association Valentransition monte au créneau. « Cette énième catastrophe ne peut pas passer par profits et pertes suivant la bonne vieille routine qui avait cours ces dernières décennies : accident, explications embrouillées, enquête discrète, archivage, oubli. Nous n’acceptons plus cette pseudo fatalité », commente Marc Duvivier, président de l’association Valentransition.
Pour la liste « Valenciennes Verte et Solidaire », Quentin Omont (EELV) pose des questions très concrètes dans un communiqué le 01 mai : « Quand la nappe de boue qui se trouve désormais en Belgique a-t-elle passé les écluses valenciennoises ? Qui a pris la décision de les ouvrir pour laisser passer cette nappe « tueuse » sans prévenir les voisins condéens, fresnois et belges ? Les Belges ont réagi et agi, notamment en récupérant des poissons encore vivants et en injectant de l’oxygène pur directement dans l’eau du fleuve. Pourquoi cela n’a-t-il pas été fait côté français ? ». Il rappelle également qu’une entreprise a été missionnée (et payée) par TEREOS pour ramasser les « qui reconnaît bien là implicitement sa responsabilité, y ramasse des quantités de poissons morts depuis la mi-avril ».
Pour sa part, Delphine Batho, présidente du parti « Génération Ecologie », et marraine de l’association Valentransition, a déposé une question écrite au gouvernement le 29 avril dernier (à télécharger ci-jointe). Elle demande en substance « vouloir faire connaître la position du Gouvernement à cet égard alors que la pollution de l’Escaut constitue une catastrophe écologique majeure ».
Pour la France Insoumise, Adrien Quatennens, début du Nord, souligne les reproches des autorités belges à la France « je demande au Préfet du Nord de fournir des explications précises quand à ces négligences ».
Enfin, les élus du PCF dans une lettre du 02 mai, commente : « Nous sommes très inquiets, nous demandons que toute la lumière soit faite sur ce désastre écologique. Il est important de connaitre les origines et les causes de celui-ci et que la responsabilité des uns et des autres soit recherchée afin d’obtenir réparation ».
Le retour à une vie (presque) normale fera peut-être toute la lumière sur cette pollution ?
Néanmoins, face au communiqué de presse de TEREOS, je ne peux m’empêcher de penser au président des Etats-Unis même sans aucun rapport direct. Donald Trump nous avait en janvier 2019, durant un hiver vigoureux aux USA, gratifié d’une phrase mythique… « qu’une petite dose de ce bon vieux réchauffement climatique serait la bienvenue en cette saison ». Donald Trump nous mentirait-il ? Flûte alors !!!
Daniel Carlier