(Fresnes) La concorde pour Saint-Martin
A travers la signature d’une convention tripartite entre la commune de Fresnes-sur-Escaut, le Diocèse de Cambrai, et l’association Astuce, les parties prenantes se dotent d’un outil de sauvegarde d’un patrimoine religieux précieux pour tous les Fresnois, l’église Saint-Martin.
Valérie Fornies : « Nous voulons maintenir ce lieu de culte sur Fresnes-sur-Escaut »
Depuis la loi de séparation de l’Eglise et de l’Etat en 1905, les communes sont propriétaires du foncier religieux existant de l’église catholique à cette époque. Tout en étant en responsabilité concernant le bâti, le Diocèse est de par la loi l’affectataire désigné. De facto, la commune doit laisser un accès libre, gratuit, et perpétuel à l’église, en l’occurence au Diocèse de Cambrai, et plus précisément encore au sein de l l’église Saint-Martin sur Fresnes-sur-Escaut.
Construite entre 1867 et 1871, elle est d’un style néogothique. L’église Saint-Martin et son mobilier sont dans l’inventaire établi dans le cadre de l’application de la loi de 1905. Néanmoins, cet édifice religieux traverse difficilement les deux guerres mondiales. Chemin faisant, le ravage du temps a fait son oeuvre comme sur un visage flétri. « L’église Saint-Martin s’est dégradée fortement dès le début des années 2000. D’ailleurs, un arrêté de péril est en vigueur depuis novembre 2010 », indique Robert Valin, le président de la l’association Astuce ( Association de Sauvegarde & Transmission du patrimoine et d’Union Culturelle autour de l’Eglise St-Martin de Fresnes-sur-Escaut). Cette dernière est sortie de terre peu avant la fermeture de l’église. « Nous avons essayé de proposer des aménagements, mais rien n’y a fait, les dégradations étaient trop importantes », poursuit Robert Valin.
« Nous travaillons depuis plus de deux ans sur cette convention. Nous voulons maintenir ce lieu de culte sur Fresnes-sur-Escaut. Cette convention valable pour une durée de dix ans va nous permettre de graver ce projet dans la durée quel que soit l’avenir (politique) », commente Valérie Fornies, le premier magistrat de Fresnes-sur-Escaut.
Clairement, les trois parties en présence veulent fixer à moyen terme un projet de travaux. « Une étude a été lancée en 2018, les différents scénarios évaluent ce chantier entre 5 et 6,5 millions d’euros. Pour l’instant, ce n’est pas dans notre capacité budgétaire, mais au moins nous marquons notre détermination à faire dans le temps », poursuit l’édile de la commune.
« Pas forcément besoin d’une église cathédrale de 1 500 places », Caroline Biencourt
Pour trouver le projet idoine concernant la restauration de l’église Saint-Martin, l’association Astuce oeuvre depuis près de dix ans. La difficulté est la dégradation avancée de cette église. « Il y a plusieurs simulations. Néanmoins, notre objectif premier est de conserver ce lieu de culte sur cet endroit, et de maintenir un élément de patrimoine en bon état même si nous devons opérer un plan de coupe sur le futur projet », commente Robert Valin,
En clair, la dimension hors sol de cette église sur Fresnes-sur-Escaut n’est peut-être plus d’actualité. « Pas forcément besoin d’une église-cathédrale avec 1 500 places, mais rien n’est arrêté. Aucun scénario n’est figé à ce jour. Je suis tous les projets de restauration sur le Diocèse de Cambrai », commente Caroline Biencourt, conservateur au Diocèse de Cambrai. Toutefois, quelques balises fédèrent les membres de l’association Astuce. « L’honneur serait sauf si nous conservions notre clocher, c’est un symbole. Pour le reste, cela peut se concrétiser à travers une église moderne, salle de catéchèse, sanitaire, espace pour les fidèles etc. », ajoute Robert Valin.
D’ailleurs, 55 membres de l’association Astuce étaient présents pour cette information sur la dite convention à la grande joie de Monseigneur Dollmann. Des exemples d’églises restaurées ont été présentées à ce public éclairé, histoire de faire accepter un changement drastique architectural si besoin était… !
« Je viens d’une région concordataire », Monseigneur Dollmann
Le concordat de 1801 est le régime organisant les rapports entre les différentes religions et l’État dans toute la France depuis 1801. Il a été abrogé par la loi de 1905 sauf en Alsace-Moselle. « Je suis resté plus de 15 ans sur Strasbourg, j’ai d’abord une pensée pour les victimes de ce terroriste. Par ailleurs, je suis habitué à ce type de convention puisque je viens de cette région concordataire. Cet accord va permettre une véritable collaboration, car nous avons une tradition commune dans le respect du patrimoine cultuel », commente Monseigneur Vincent Dollmann.
Avec trois sites classés sur Fresnes-sur-Escaut (dont la gare SNCF), l’église Saint-Martin, qui ne l’est pas, constitue un chantier complexe. Heureusement, ce travail d’équipe bénéficie de l’accompagnement de Caroline Biencourt, conservateur au Diocèse de Cambrai. « Je remercie Caroline pour son approche qualifiante sur ce dossier », ajoute Monseigneur. « L’idée est de ne pas subir une restauration, voire de constater une destruction pure et simple, mais de collaborer sur un projet concret », précise Caroline Biencourt.
Voilà une convention très éloignée de l’esprit laïc stricto sensu, mais n’est-il pas plus important qu’un patrimoine religieux, peu importe la confession, retrouve une seconde vie plutôt qu’une destruction sur l’autel des principes de la séparation de l’Eglise et de l’Etat. Même la constitution française peut respirer un peu… !
Daniel Carlier