Territoire

Brigitte Mauroy démissionne du Groupe UDI-UC au Conseil régional face au choix politique de Valérie Létard

Les élections sénatoriales n’ont pas fini de bousculer le nouveau PAF (Paysage Politique Français), car la donne politique issue des élections municipale en 2014 est encore très présente. Brigitte Mauroy, nièce de Pierre Mauroy, démissionne du groupe UDI-UC au sein du Conseil régional des Hauts-de-France à travers un courrier fustigeant le choix de Valérie Létard quittant la 1ère vice-présidence au Conseil régional des Hauts-de-France.

L’émergence des nouveaux Conseils régionaux, cette super région des Hauts-de-France, avait fait naître un espoir sur l’importance accordée à cette institution par les élus engagés, et plus que tous les autres, les membres de l’exécutif régional. Force est de constater que Xavier Bertrand, Gérald Darmanin, avant d’aller au gouvernement, avaient décidé de cesser leur mandat parlementaire car la tâche était colossale. Remettre sur pied un territoire de 6 millions d’habitants, quel défi, quelle mission dans laquelle s’est inscrite Valérie Létard.

« Sauf que vous êtes le chantre de la politique à l’ancienne », Brigitte Mauroy

C’est pourquoi, un mouvement s’est imprimé autour d’une liste de rassemblement Les Républicains avec Xavier Bertrand et l’UDI emmenée par Valérie Létard. Brigitte Mauroy a fait partie de cette dynamique, enroulée «  sous votre bannière avec l’idée que nous allions faire de la politique autrement ». Bien sûr, Valérie Létard a sans doute juré la main sur le coeur que c’était le mandat qui valait tous les combats ,« sauf que vous êtes le chantre de la politique à l’ancienne », assène Brigitte Mauroy dans son courrier de démission !

Constat factuel, 18 mois après cette élection, Valérie Létard retournait en campagne, aux affaires sénatoriales en se présentant comme tête de liste, avec un propulseur comme Jean-René Lecerf, aucun suspense, pas de prise de risque de partir sur son seul nom ! Victoire dans un fauteuil et la résultante est l’abandon de la 1ère vice-présidence de la région des Hauts-de-France…au grand désarroi de Brigitte Mauroy.

Par voie de conséquence, l’élue régionale a décidé de démissionner du Groupe UDI-UC au sein du Conseil régional des Hauts-de-France (courrier bas de page), le moins que l’on puisse dire est que ce choix politique ne passe pas, mais pas du tout chez tous les élu(e)s.

Un choix sénatorial déjà pris avant l’élection régionale ?

Avec le recul, cela n’est (malheureusement) pas une surprise… En effet, Valérie Létard ne s’est jamais présentée à une élection au suffrage universel comme tête de liste dans une collectivité locale, même pas dans son village de Lecelles (sauf aux régionales 2010, score historiquement bas sur Valenciennes). La voie royale passait donc par les Grands électeurs, les élus des collectivités qui vous envoient au Sénat. Le lobbying politique d’un Jean-Louis Borloo l’a emmené au gouvernement pour assumer deux postes de Secrétaire d’Etat. L’ancien maire emblématique de Valenciennes a réussi (également) à porter l’ancienne élue de Valenciennes à la fonction prestigieuse de parlementaire au Sénat. Un autre choix que de se représenter (encore) à ces Sénatoriales était tout simplement impensable au regard de cette trajectoire politique très personnelle !

L’argument massue avancé est « la loi du non cumul est passée par là », dit la vice-présidente du Sénat dans le Voix du Nord. Certes, mais en 2015, la loi du non cumul était déjà votée (14 février 2014) et programmée pour s’appliquer dès ce nouveau quinquennat. Aucun candidat à la présidentielle n’a affiché un éventuel retour sur cette disposition, tout juste une rumeur sur les parlementaires du Sénat. En clair, ce n’est pas un argument valable au sens de l’intérêt supérieur d’une région des Hauts-de-France dont les maux sont multiples. Une équipe politique soudée constitue indéniablement une plus-value pour l’exécutif régional… sauf que le mot proche est une plaisanterie en l’occurence.

Parfois, deux hommes ou femmes de partis politiques différents se respectent ce qui positionne l’intérêt général avant le particulier. En l’occurence, la coexistence au sein du gouvernent entre Xavier Bertrand et Valérie Létard a laissé place a une inimité notoire. Pour autant, dès le printemps 2015, les négociations ont commencé entre l’appareil politique de l’UDI et Xavier Bertrand. Cette bataille pour un positionnement de choix, deuxième sur la liste, et surtout promise à un poste de 1ère Vice-Présidente fut rude, mais remportée par l’entourage de Valérie Létard. Cela fut le plus improbable attelage politique dans cette région tant les divergences de fond et de forme sont béantes entre Xavier Bertrand et Valérie Létard !

Alors, au final, l’abandon de cette 1ère vice-présidence dans la région des Hauts-de-France est-il aussi surprenant que cela ? Est-il un soulagement pour Xavier Bertrand dont sa diatribe à Jean-Louis Borloo résonne encore… commentant leur collaboration Ministre:Secrétaire d’Etat « je fais tout, elle fait le reste » ! La haute fonction occupée par Valérie Létard, vice -présidente du Sénat, constitue indéniablement le zénith d’une carrière personnelle de bout en bout.

« en accord avec mes engagements et mes principes », Brigitte Mauroy

La conséquence de ce choix politique est claire sur deux points :

D’abord, l’exécutif régional est bousculé « il est irresponsable aujourd’hui de tenter de le mettre en difficulté et de l’affaiblir, en oubliant l’intérêt général », indique Brigitte Mauroy.

Ensuite, la seule conclusion politique possible est : « J’ai donc décidé de quitter le groupe UDI-UC, afin d’être en accord avec mes engagements et mes principes » , commente Brigitte Mauroy (Courrier en bas de l’article). Brigitte Mauroy, Secrétaire nationale du Parti radical, indique par ailleurs qu’elle siègera désormais au Conseil régional des Hauts-de-France en tant que non inscrite (dans un groupe).

Fraichement élue en 2015 en deuxième position derrière Xavier Bertrand, Valérie Létard soulignait devant les caméras  » c’est la dernière fois que le Front Républicain fonctionne  » ; et assurément cela est vrai avec ce profil de choix individuel au détriment de l’intérêt collectif. Les extrêmes se délectent des parcours personnels face aux enjeux collectifs abandonnés d’une région sous tension.

Mais le fin du fin de la politique à l’ancienne est tout de même de signer, via Jean-Christophe Lagarde un soutien à François Fillon au 1er tour de la présidentielle, et en même temps de se pointer au dernier meeting d’Emmanuel Macron, avant le 1er tour, sur Arras et au 1er rang,… histoire de bien assurer ses arrières ! Pour le dessert, on pourrait prétendre également que la défense du Canal Seine Nord serait plus efficace dans la fonction de vice-présidente au Sénat que dans celle de 1ère vice-présidente au Conseil régional des territoires concernés au premier chef, tellement crédible !

Plus globalement, à force de baliser la normalité de ces comportements politiques, ne cherchez pas plus loin l’explication du record absolu d’abstention dans les urnes en 2017, cette attitude familière caractérisant pléthore d’élu(e)s n’est que le miroir d’une conception de l’intérêt collectif, égoïste, individualisé, autocentré… en une phrase, ce sont les nombrils insoumis de la politique française ! «  La politique autrement »… alea jacta est !

Daniel Carlier

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