Rencontre avec la « Tym ! » caricatures… de presse
Pour ces Fêtes de Noël, parlons d’un métier où les professionnels sont de moins en moins nombreux, où les postes sont la première variable d’ajustement budgétaire dans un média, où la caricature peut devenir mortifère pour l’auteur.e comme chez Charlie Hebdo. Alors, éclairons notre lanterne corsetée pour mieux comprendre cette irrévérence face à une actualité insondable, notre bouée de sauvetage dessinée face au spectacle quotidien du monde. Rencontre avec le dessinateur « Tym ! », basé dans la région lilloise, afin de découvrir son chemin atypique dans la profession, mais surtout ce besoin irrépressible du trait rempli de sens (visuel Tym ! avec sa série de toiles Catfilou).
(visuel dessin de presse dans le Journal de la Corse)
« Tym ! » : « Mon dessin doit avoir une fonction ! »
Passion dévorante dès son plus jeune âge, Tym ! n’a pourtant pas embrasser une carrière professionnelle dès que possible. Issu d’une famille « très modeste. On n’avait pas un sou. La hantise du frigo vide reste graver inconsciemment encore aujourd’hui. C’est pourquoi, de manière très cartésienne, j’ai enchaîné les métiers alimentaires pour (enfin) obtenir un emploi stable comme responsable financier dans une PME », explique le dessinateur. Parmi ces jobs, la photographie a été une compagne de route importante, déjà précurseur d’un autre destin. « Quand vous savez cadrer, l’oeil, la perspective, la photographie est déjà un art », mentionne le caricaturiste. Toutefois, l’envie du trait demeure chevillé au corps de Tym !, mais pas n’importe quel coup de crayon,. « Faire du paysage même très beau ne m’intéresse pas du tout. Mon dessin doit avoir une fonction et j’espère faire rire. La BD n’a pas non plus d’attrait pour moi, car je souhaite dans une seule case tout dire, le contexte, la note d’humour, faire comprendre ou prendre du recul. » On l’a compris, Tym ! était formaté pour la caricature, un art ô combien difficile à maîtriser.
Fort d’une sécurité financière, il a franchi le Rubicon du dessin professionnel en 2003. De suite, l’influence du cartoon américain est omniprésent dans son travail. Très politique à ses débuts, il profite aussi de sa Geek attitude, car dès 1997, un peu la préhistoire du web, « j’ai réalisé mon propre site internet où j’ai montré mes premiers dessins ». Evidemment, au balbutiement du web, les protagonistes sur la toile sont très peu nombreux et par suite forment une communauté très active. « Même comme amateur, je me suis fait connaître à travers mon site internet », commente Tym !
Ensuite, il passe la vitesse supérieure et fait des rencontres comme celle du dessinateur Jean-Michel Delambre, emblématique caricaturiste du « Canard Enchaîné ». « Je collabore avec lui pour tous ses livres, la mise en page, son site internet, la traduction de son travail traditionnel en version numérique », explique Tym !
Dessinateur de presse… !
Après la diffusion de livres sur ses dessins le plus souvent en auto-édition, il accède au statut de dessinateur de presse grâce à ses publications « dans le Journal de la Corse. C’est l’équivalent de la Gazette du Nord Pas de Calais avec des annonces légales et des pages rédactionnelles. Je publie chaque semaine un strip de trois cases en compagnie de J.M Delambre », explique le dessinateur.
Bien sûr, l’émergence des réseaux sociaux a permis à l’artiste de se faire connaître plus loin et au-delà. « Aujourd’hui, je fais des salons également pour exposer mes dessins et mes toiles (comme sur Maing récemment). Je fais partie de l’association France Cartoon, une des deux communautés existantes dans le monde. Je participe également chaque année au salon de Saint–Just-le-Martel (20 minutes en voiture de Limoges), l’Angoulême (BD) pour les dessinateurs de presse. Les professionnels viennent du monde entier », poursuit-il. En 2024 en France, vous avez peut-être une centaine de dessinateur de presse et qui en vivent principalement sans doute moins. En l’espèce, l’indépendance financière de Tym ! lui permet de faire ses choix propres et ce n’est pas un détail anodin. Bien sûr, l’Intelligence Artificielle constitue un danger de premier plan, la profession de dessinateur de presse est visée comme tant d’autres par cette thrombose de l’imaginaire. Tym !, très au fait de l’informatique est totalement « conscient du danger à venir», mais comme dans beaucoup de domaines, la politique de la chaise vide accélèrerait le processus. Alors, Tym !, ses confrères et ses consoeurs font de la résistance merveilleuse !
Enfin, la Covid a poussé l’artiste à ajouter une corde de plus à son arc. Il a occupé son temps libre durant quelques mois a lancé une série de peintures avec son personnage, son propre chat rebaptisé « Catfilou ». En fait, il s’inspire des images célèbres où son chat va s’infiltrer comme dans la série « Cat Eyes » ou à l’occasion de la sortie du livre sur Vincent Van Gogh (visuel d’accueil). Voilà, caricature, peinture, travail numérique collaboratif, les passions sont multiples pour ce cht’ti hors du commun. Retrouvez « Tym ! » sur Facebook : tym masq et tymcartoon, mais aussi sur son site web www.tym-cartoon.com
Daniel Carlier