(Beuvrages) Ali Ben Yahia, 3 ans d’avancées, 3 ans encore pour convaincre !
Elu au 1er tour en mars 2020, le nouveau maire de Beuvrages apprend comme toute la France le confinement généralisé suite à la pandémie du Covid. Comme les milliers d’autres élus, il prendra donc ses fonctions officielles 3 mois plus tard avec déjà un moment singulier, un entre-deux politique improbable. Ensuite, sa seule boussole demeure le terrain, encore et encore, depuis trois ans et la mise en oeuvre de son programme avec des temps forts politiques particuliers et éruptifs comme l’élection départementale ; rencontre avec la surprise de ce 15 mars 2020, Ali Ben Yahia.
L’atout terrain du maire de Beuvrages
Cette élection au 1er tour de cette municipale rocambolesque, compte tenu de la COVID, lui laisse encore des souvenirs joyeux comme ce texto de Cécile Gallez « tu l’as bien mérité ».
Tous les maires élus en 2020, et surtout les nouveaux, ont connu une première moitié de mandat totalement iconoclaste, une crise sanitaire d’une ampleur inédite depuis la grippe espagnole, une hausse des prix sur les matériaux et les produits alimentaires, et ceci avant le conflit armé en Ukraine, et ensuite cette guerre en Europe avec par capillarité une facture exponentielle du prix de l’énergie pour les collectivités locales. Même un scénario de film, dès plus sombre scandinave, n’aurait point imaginé une première partie de mandat local aussi cabossée.
Ensuite, il ne faut pas négliger la spécificité de cette commune de 6840 habitants où sur « un rayon de 500 mètres, vous avez environ 5 000 habitants », précise le maire. En terme de densité urbaine, c’est gargantuesque !
Afin de commencer dans l’ordre des choses, sachant qu’une commune seule ne peut initier grand chose, Ali Ben Yahia est allé à la rencontre de Laurent Degallaix, le Président de Valenciennes Métropole, dès 2020, afin de mettre les choses à plat. En effet, alors que l’ANRU 1 a inondé cette commune durant presque 10 ans, un sentiment de mise à l’écart, compte tenu des sommes déjà versées, était palpable pour le nouveau maire. « J’ai rencontré Laurent Degallaix pour lui dire que Beuvrages avait besoin de Valenciennes Métropole. Certes, nous n’avons pas postulé à l’ANRU 2, mais au moins faudrait-il achever l’ANRU 1. Ensuite, il y avait un froid politique. On m’a attribué des propos que je n’ai jamais tenu à son égard. Cette entrevue très franche a permis d’enterrer la hache de guerre », déclare l’édile.
Ce réchauffement intervient à bon escient, car toutes les collectivités locales ont travaillé d’arrache-pied sur le nouveau PLUI (Plan Local d’Urbanisation Intercommunal), un cadeau de la loi NOTRe. Bref, il faut faire avec et Ali Ben Yahia a été assez original sur le sujet : « J’ai échangé des terrains urbanisables afin qu’ils redeviennent agricoles, mais récupéré aussi du foncier sur un axe routier stratégique pour la commune ». En clair, dans le respect de la loi Climat et Résilience, il a rempli sa décroissance foncière urbaine et même rendu des terrains à l’agriculture.
Actuellement, maire de Beuvrages, Ali Ben Yahia est également 1er VP du SIMOUV, président de la commission sécurité au sein de la CAVM et membre de la commission du cycle de l’eau.
« Je me suis excusé auprès de Sylvia Duhamel », Ali Ben Yahia
Comme de nombreux maires du territoire, Ali Ben Yahia a choisi de se lancer dans l’élection départementale sur un canton où Sylvia Duhamel et André Lenquette avaient arraché ce canton en 2015. Bien sûr, le décès du regretté André Lenquette a rebattu les cartes politiques avec une candidature de la sortante et du maire de Beuvrages, en lieu et place du suppléant Fabrice Zaremba. « On a colporté que j’étais de droite. C’est faux ! Certes, je suis sympathisant du Parti radical, mais ma majorité municipale accueille tous les horizons politiques », explique le premier magistrat.
Toutefois, cette nouvelle donne politique ne présageait pas une campagne électorale, au deuxième trimestre 2021, d’une telle rudesse entre les différents candidats. Elle fut incontestablement la plus électrique du Valenciennois et d’une grande violence sur les réseaux sociaux. « Ma famille a beaucoup souffert de ces attaques personnelles sur les réseaux sociaux et je me suis excusé auprès de Sylvia Duhamel. Je suis la cause de son échec », commente-t-il acceptant que sa présence avait fait perdre la sortante.
Néanmoins pour conclure sur cet épisode tendu, l’édile comprend difficilement le jeu de son opposition municipale durant cette cantonale 2021 : « On m’a clairement dit- on ne voulait pas de vous sur ce canton- et ceci contre l’intérêt général des Beuvrageois ».
« Ma décision était prise avant… », Ali Ben Yahia
Un fait politique a terni plus encore le climat, notamment avec la ville d’Anzin juste après cette élection cantonale, en l’occurence le retrait de la commune de Beuvrages de la police pluracommunale. Il tient à préciser haut et fort que « ma décision était prise avant, mais je ne voulais pas que ce choix devienne un argument contre ma candidature à la cantonale. C’est pourquoi, j’ai envoyé le courrier officiel au lendemain de l’élection. Cette police pluracommunale (sur 2 agglos) ne répondait plus aux critères de sa création, c’était dans mon programme. Mes agents de la Police municipale m’ont averti plusieurs fois sur leur manque de présence sur la commune, un manque d’efficience de fait sur Beuvrages. Depuis, nous avons 5 agents, 2 ASVP, un CSU… La population semble satisfaite de leur activité sur le terrain ».
« Une ville qui avance », Ali Ben Yahia
La continuité de l’Etat comme celle administrative d’une collectivité locale est fondamentale dans une démocratie digne de ce nom. C’est pourquoi, l’édile de Beuvrages commence son bilan mi-mandat par deux projets initiés par l’opposition aujourd’hui. « La rénovation du Parc Fenelon comme du cimetière a été initiée par l’ancienne majorité même si j’ai remis en cohérence les projets sur le volet développement durable et accessibilité », souligne Ali Ben Yahia. Effectivement, le Parc Fenelon, si proche de l’Hôtel de Ville, est devenu un espace vert de qualité au coeur d’une urbanité intense.
Logiquement, le résultat d’une nouvelle entente cordiale avec l’intercommunalité amène une prise en charge de la CAVM de deux rues déclassées sur Anzin par Géry Duval (ancien maire 2001/2008), mais traversante sur Beuvrages, rue Waldeck Rousseau et rue Jean Jaurès.
Evidemment, un mandat local serait trop simple sans les imprévus, hors crise mondiale ou nationale, et la commune a eu son lot. « Tout d’abord, nous avons détecté un problème structurel sur l’école Paul Langevin. Ainsi, nous avons remis à jour le bâti pour 20 ans sans mettre une enveloppe thermique afin de conserver un visuel. Une autre école faisait l’objet d’un litige de longue date que nous avons résolu grâce à un expert indépendant. Ainsi, nous avons pu remettre en conformité l’école Jules Ferry pour 930 000 euros », explique le maire.
Pour exister en terme d’investissement sur sa collectivité locale, il faut le soutien de l’Etat, de la région, du département, et de l’agglo… Dans l’ordre, Ali Ben Yahia tient particulièrement à exposer sa collaboration avec l’Etat de proximité : « Depuis le début de mon mandat, j’ai entretenu des bons rapports avec le Sous-Préfet de Valenciennes, l’ancien Michel Chpilevsky, et l’actuel Guillaume Quenet. A ce titre, je remercie l’Etat pour son soutien dans nos projets sur Beuvrages. Concernant le Conseil régional, Salvatore Castiglione et Elisabeth Gondy sont des relais importants pour nous. Enfin, il y a une bonne entente avec Christian Poiret (Pdt du Conseil départemental) ».
Ensuite, le bloc social fort constitue certainement le pic de ce mandat de 6 ans. En effet, une « Maison pour les Jeunes » a déjà été inaugurée récemment (https://www.va-infos.fr/2023/03/29/un-tiers-lieu-pour-les-jeunes-a-beuvrages/). « Elle est destinée au 16/25 ans et connaît un beau succès grâce à un médiateur et coordonateur de Beuvrages », indique le maire. Dans la foulée, un premier arbre a été planté, à deux pas rue de la Liberté, concernant la future « Maison de la Famille et des Enfants », technique EVS Espace de Vie Sociale) dont la CAF est un financer majeur, et enfin une « Maison de la Cohésion social et de la Solidarité » où « nous allons fusionner le CCAS avec des services sénior, logement, santé, et emploi sans oublier une épicerie sociale », explique le premier magistrat. Ces 3 sites se situent en plein coeur d’un quartier Politique de la Ville. A noter que sur le volet durable, la « Maison des Jeunes » est le fruit d’un assemblage de container/habitat fabriqué par Mokha, dans le giron d’ADELI, avec 3 500 heures en insertion.
Enfin, le logement, malgré une densité urbaine très forte, n’est pas en reste. « Il faut finir l’ANRU 1 et je ne remercierai jamais assez Pierre Tonneau, DG de SIGH, pour on aide. En effet, ce bailleur social va construire 6 maisons individuels et 20 logements collectifs (proche hôtel de ville) à l’accès à la propriété », commente le maire. Dans la foulée, un projet tombé dans les oubliettes, passé de main en main entre Nexity, Pierre et Territoire, et aujourd’hui Tisserin promotion (privé) pour la réalisation de 27 logements, se localise sur la place du 11 novembre en accès location/achat « tout a été vendu en 3 mois. Nous avons plus de demandes que d’offres de logement libre sur Beuvrages ». Et pour boucler cette empreinte habitat, une résidence sénior de 45 places déjà livrée durant cette première partie de mandat.
Tout ce chemin parcouru, tout en soulignant ce qu’il reste à faire, fait dire au maire : « Beuvrages, une ville qui avance ».
« Je comprends la souffrance de certains élus », Ali Ben Yahia
En conclusion, le maire de Beuvrages ne cesse de montrer sa détermination, d’arpenter le terrain entre questionnement sur le commerce de proximité et vérification de l’avancement d’un chantier, ça bouillonne, il y a toujours un sujet où la collectivité locale peut faire mieux. Cela pousse à une belle dose d’humilité, mais également à poursuivre son mandat dans l’intérêt des administrés tout en constatant la difficulté de la tâche. « Je comprends la souffrance de certains élus (et de certaines démissions). Avec des collègues maires, on se dit par moment a quoi bon prendre un mandat pareil ! On se lance corps et âme, parfois au détriment de sa vie personnelle, et vous subissez des attaques d’une rare violence. Ensuite, les émoluments ne sont pas le reflet de la charge au quotidien », déclare le maire de Beuvrages. Par ailleurs, Ali Ben Yahia est enseignant à temps partiel au Lycée du Pays de Condé.
Pour se déconnecter, le maire n’hésite à nous confier ses livres favoris, mais aussi son plaisir renouvelé d’une promenade avec son chien : « Je m’échappe avec Max, mon chien que j’ai pris durant La Covid, c’est mon compagnon d’évasion. Ensuite, j’aime la lecture, notamment en lisant certaines fables de La Fontaine, l’Art de la Guerre de Suntzu, et les lettres de Machiavel ». Il n’oublie pas également ces chers disparus, André Lenquette évidemment, mais également André Obringer, un élu ami de la 1ère heure pour l’édile sans omettre les visages regrettés du territoire, Fabien Thiémé en décembre 2019, voire Cécile Gallez en juillet 2022.
S’il fallait qualifié d’un trait court le tempérament du maire de Beuvrages, on pourrait l’identifier à cette citation de Talleyrand, un expert politique : « On ne croit qu’en ceux qui croient en eux ».
Daniel Carlier