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Les Turbulentes 2023, une invitation à contempler pour ouvrir enfin les yeux

Cette année, le Boulon nous a invité à souffler les 25 bougies de ses Turbulentes. Si La Cabane à plumes a ponctué l’événement de ses interventions grandioses, les différentes compagnies invitées ont à leur manière apporté leur touche à cette grande fête populaire qui n’a pas seulement durée 3 jours, mais qui se prépare depuis quelques mois, au cœur de la ville de Vieux Condé. Sous un contexte joyeux et poétique, le parti pris d’ouvrir les consciences à notre environnement. Cette année, nous avons suivi une bénévole, Priscilla, participante à plusieurs spectacles en amont des Turbulentes (visuel spectacle KHTA).

(Visuel de la déambulation finale de la Cabane à plumes)

Des centaines de petites mains pour un événement grandiose

La Khta compagnie a lancée, tout comme la compagnie L’homme debout, un appel à participation pour que les habitants soient concrètement à l’œuvre.  Parce que Les Turbulentes, ce ne sont pas que des spectacles, c’est aussi un événement aujourd’hui très attendu par tous mais qui concerne de très près la population locale ; un événement qui bouscule les habitants, les amène à découvrir leur ville autrement, à faire aimer certains lieux abandonnés pour les faire revivre par la magie des mots et des gestes.

En amont des Turbulentes, la Cabane à Plumes Place d’Armes à Valenciennes avec Priscilla

Priscilla, une habitante de Condé, s’est particulièrement investie cette année : « Concernant la Cabane à plume(s), j’incarne durant deux dates une résurgence, une mystérieuse marionnette en osier colorée et esthétiquement rigolote qui a pour rôle de venir en aide à Plume. Nous avons également participé avec mes enfants à la confection des têtes d’oiseaux en osier. C’est ça qui m’a plu avec cette compagnie, c’est de défendre l’idée que tout le monde puisse y mettre sa patte. Il s’agit d’incarner un travail collectif. Ce sont des valeurs qui me sont chères. »

L’objectif de la compagnie L’homme debout est d’utiliser l’image de la cabane pour questionner notre rapport au monde. Le territoire de jeu et ses habitant.e.s, des éléments essentiels du récit. Le spectacle met en jeu une enfant d’une dizaine d’années. On ne sait pas si elle habite ici ou si elle vient d’ailleurs, son monde à elle, c’est sa cabane, et elle est menacée. 

KTHA, une intimité artistique… suspendue !

« Concernant La Ktha, ces valeurs sont également représentées à travers une liste de revendications dessinant les contours d’une société plus juste et belle. J’ai un rapport un peu plus familier à cette compagnie. En effet, après avoir participé à un atelier en janvier 2022, la compagnie nous a invité à l’accompagner au festival d’Aurillac cet été. C’est donc un rendez-vous afin de pouvoir les accompagner à organiser les 25 représentations, durant cette édition des Turbulentes », nous dit Priscilla.

KHTA, un moment suspendu

ON VEUT (KTHA CIE), c’est un moment suspendu, un moment plus qu’intime. 25 spectateurs, face à leurs revendications intérieures qu’ils ont laissé dormir au fond de leur ventre, qu’ils se voient énoncer un à un, dans un jeu de regard presque provocant avec le narrateur ! Ce dernier semble percer nos mystères et nos pensées parce que tout simplement, elles sont universelles.

ON VEUT se sont 25 représentations, 25 lieux, 25 acteurs, 25 moments différents et unique, 25 lieux ont résonné, 25 spectateurs ont vécu un moment intense et unique, à la tombée de la nuit ou au soleil levant, dans un parking ou 25 endroits de la ville ont absorbé les bruits alentours, des situations uniques, des phrases lâchées dans la nuit comme ces 25 bougies qui se sont soufflées au rythme du soleil.

Déambulation, Plume, nuit, mystère…

Car cette année, le rythme des Turbulentes est à la contemplation, comme une prise de conscience qu’il faut s’écouter, écouter et regarder les autres, habiter les lieux et se laisser le temps, du temps pour soi, du temps pour les autres. Quand les spectateurs ont vu se réveiller Plume, samedi à la tombée de la nuit, c’est sans réfléchir qu’ils se sont mis à la suivre, doucement, en laissant leurs pas se joindre à ceux des autres spectateurs, dans une osmose, dans une confiance absolue.

Un moment magique qui s’est prolongé autour d’une danse enivrante entre Plume et un oiseau. Une poésie pure qui pourtant est aussi présage, que le danger n’est pas loin. La soirée de clôture nous en a fait la démonstration par la destruction de la cabane par une mystérieuse grue/monstre. Pourtant, l’espoir revient quand l’oiseau géant vient prendre Plume dans ses bras. Il faut continuer à croire, à lutter, à se mobiliser. Il faut continuer à marcher.

Cette année, de nombreux spectacles étaient en effet sous forme de déambulation, une invitation à se déplacer tous ensemble comme pour faire bouger les choses. Une invitation à s’assoir ou pas, à suivre ou pas, à s’arrêter ou pas, mais à être acteur de ses choix.

Les Turbulentes, sous prétexte de spectacles qui font rire ou pleurer, émerveillent ou intriguent, auront encore une fois laissé des traces dans les esprits des petits et des grands. Des prises de consciences qui seront encore pendant quelques jours dans les esprits telles de petites flammes, mais qui bientôt se révèleront sous forme de réflexion sur la nature et sa préservation. « Au-delà du fait que ce soit grandiose par la taille, je crois que c’est tout ce travail de petites mains venues d’un peu partout qui ajoute une dimension sociale importante. C’est porteur de valeurs essentielles à cette société parfois fragile, individualiste. C’est une belle manière de résister. Ce spectacle questionne et reflète symboliquement notre rapport au monde », nous dit Priscilla.

La Cabane à Plumes à Chabaud Latour

Pour la compagnie de L’homme debout , « L’implication des spectatrices et spectateurs dans la cabane à Plume(s) est un élément fondamental de sa réussite ». On peut dire que le pari est réussi.

Les Turbulentes sont les premiers spectacles auxquels Priscilla a pu assister lorsqu’elle était enfant. « Issue d’un milieu modeste, je n’ai jamais poussé les portes d’un théâtre en famille, permettre d’amener les spectacles dans l’espace public permet de gommer les inégalités sociales. C’est essentiel à la société. » Depuis, elle se rend aux Turbulentes chaque année. « Je les attends toujours impatiemment. C’est ma bulle d’espoir, de beauté, d’harmonie. Je ne remercierai jamais assez le Boulon pour ce qu’il m’apporte », conclut-elle comme une déclaration d’amour à l’art et au spectacle.

Jane Huvelle

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