L’épilepsie et sa gestion de « crise »
A l’occasion de la journée internationale de l’épilepsie, la Dr Simone Fortier, ex cheffe de service de neurologie au CHV, aujourd’hui référente Hauts-de-France au sein de l’association « Epilepsie France », est venue effectuer une formation pour les agents du Cap Emploi Grand Hainaut à Valenciennes, notamment les conseillers confrontés au public. Un éclairage pertinent pour une maladie méconnue, mais présente dans l’entourage de beaucoup d’entre nous, car l’intensité de l’épilepsie est très variable, selon les âges, suivant le type de crise, et évidemment selon la résistance, ou pas, au traitement médicamenteux de cette pathologie.
Dr Simone Fortier : « La particularité de l’épilepsie est le caractère répétitif de la crise, c’est toujours la même »
Cette maladie n’est pas une nouveauté des temps modernes, elle existe depuis l’antiquité. Bien sûr, sa compréhension a évolué au fil du temps même si ses alertes sont toujours mal perçues chez le commun des mortels. « La crise générale fait toujours peur, elle est impressionnante, le malade bave, se débat, etc., elle est encore tabou ! Toutefois, il existe également des crises focales (ou partielles) pour les malades victimes d’une épilepsie », explique le Dr Simone Fortier.
Pour bien comprendre, il faut repartir à l’origine de cette maladie : « Notre cerveau produit de l’électricité. Parfois, il est totalement en hyperactivité électrique (crise générale), parfois une seule partie du cerveau est atteinte. C’est pourquoi, la crise focale (crise partielle) peut être très différente suivant la zone touchée. En fait, la personne est victime d’un syndrome confusionnel, une absence, des gestes ou des mouvements incontrôlés. Par contre, la particularité de l’épilepsie est le caractère répétitif de la crise, c’est toujours la même crise a contrario d’un cas de schizophrénie. L’épilepsie est une maladie neurologique et pas psychiatrique.».
Ensuite, il faut souligner un point important soulevé par la spécialiste. « Cette maladie n’est pas héréditaire. Ce n’est pas d’une logique mendélienne (théorie de Mendel), elle n’est pas automatiquement transmise à l’enfant in utero. Bien sûr, une vigilance accrue est indispensable pour les parents déjà épileptiques », ajoute-t-elle.
30% de cas résistants
Concrètement, sur les 600 000 à 750 000 personnes en situation épileptique, chaque année en France, les évolutions sont diverses. Les deux âges où cette maladie éclate au grand jour sont avant 20 ou après 60 ans, entre ces deux âges, cette maladie fait, dans l’immense généralité, une pause. « Pour les enfants et adolescents, des traitements sont existants et performants. 70% des pathologies sont guéries. Toutefois, il demeure 30% de cas résistants au traitement médicamenteux », précise-t-elle.
Cette maladie n’est pas facile à vivre pour l’enfant et l’adolescent. « C’est souvent une souffrance face au regard des autres. C’est pourquoi, une information est nécessaire pour les corps enseignants et administratifs d’un établissement scolaire. Je rappelle qu’un élève atteint de cette maladie peut bénéficier d’1/3 temps de plus à l’occasion de ses examens. Il faut absolument signaler cette pathologie à la direction de l’école, du collège, ou du lycée », ajoute le Dr Simone Fortier.
Parfois, il arrive que cette pathologie se déclare après 60 ans, notamment à la suite d’un AVC. « C’est très fréquent, mais les séquelles sont bien traitées », ajoute-t-elle.
L’insertion professionnelle recommandée
Evidemment, le monde du travail n’est pas exclu, mais limité à certaines professions, car les métiers de la conduite, l’Armée, la Police Nationale, voire de la mise en danger d’autrui ou de soi- même… pour une personne encore en crise régulièrement (les fameux 30%) sont inaccessibles (plus d’infos sur www.epilepsie-france.fr).
Toutefois, l’ambiguïté des obligations de part et d’autre peut laisser perplexe. « Un salarié n’est pas obligé de mentionner sa pathologie à son employeur. Par contre, en cas d’accident, par exemple au volant si vous n’avez pas le droit de conduire, l’assurance ne prendra pas en charge votre responsabilité (donc les dommages), car vous avez omis (et de fait menti) cette précision sur votre état de santé », explique le Dr Simone Fortier.
Les situations de stress multiples sont à éviter. D’ailleurs, toutes les personnes atteintes connaissent la liste des événements susceptibles de générer une crise. Pour autant, si le travail, le sport, la pratique culturelle… sont émancipateurs, un plus incontestable dans le quotidien d’un épileptique ; la connaissance de ses limites constitue un préambule incontournable à l’évolution de l’intéressé dans un corpus sociétal bienveillant… si l’information circule. Le curseur n’est pas de s’appesantir sur le métier qu’il n’est pas possible de faire, mais plutôt celui en phase avec votre pathologie, parfois invalidante ; voilà, le travail d’un conseiller en insertion professionnelle quel que soit l’opérateur. Bien sûr, on parle de théorie, car il arrive que l’intéressé.e n’a pas conscience de cette limite pathologique avec qui plus est un secret professionnel absolu, rien n’est simple à expliquer à celui qui ne veut pas entendre. « Oui, la personne atteinte de cette maladie peut travailler dans un milieu ordinaire, mais aménagé. Il faut une vision réaliste de l’épilepsie », commente la référente Hauts-de-France de l’association nationale.
Contact/SimoneFortier/Délégation Epilepsie France 59-62 : simone.fortier@epilepsie-france.fr
Daniel Carlier