(St-Amand) Un débat de fond passionnant sur le budget primitif
Le temps fort de l’année pour un hémicycle local demeure toujours celui du vote du Budget primitif. Le rendez-vous ne fut pas galvauder au Conseil municipal de la cité thermale où les choix politiques entre le temps court et le temps long d’une gestion financière locale ont percuté notre actualité sociale, omniprésente, comme la guerre en Ukraine, pressante, mais diablement indécise !
Alain Bocquet : « L’Etat utilise les communes comme variable d’ajustement de sa fiscalité et de ses dettes »
Les premières délibérations budgétaires ont posé le débat pour la suite du Conseil local entre la majorité et l’opposition. En effet, Sylvie Wiart, l’adjointe aux finances, annonce un résultat net de clôture 2022 plus important que prévu initialement, soit 6 355 725 euros : « Ce chiffre s’explique notamment par une fréquentation supérieure au Pasino ». Cet excédent sera le fil rouge durant tout ce conseil municipal de Saint-Amand-les-Eaux.
« Garder le cap de l’investissement pour l’avenir », Sylvie Wiart
Le choix budgétaire 2023 est à la grande prudence pour la majorité municipale. Le budget global prévisionnel s’inscrit à 46 330 000 euros avec 31 086 000 euros en section de fonctionnement (+ 1% en 2023). « Nous restons prudents, car nous prévoyons une baisse de 8% des recettes du Pasino, moins 8% sur les droits de mutation compte tenu du ralentissement des ventes immobilières, une diminution de 3% sur les eaux minérales. Ensuite, nous constatons la hausse de 7,1% des bases fiscales de l’Etat sur la taxe foncière (bâti et non bâti), alors que, comme depuis 15 ans, nous n’augmentons pas nos bases fiscales locales », déclare Sylvie Wiart. Les dotations de l’Etat sont plus fortes que prévues, mais ne compensent que trop faiblement certains paramètres exogènes.
En effet, des facteurs particuliers pèsent sur ce budget comme la hausse exponentielle des factures énergétiques pour les communes, la restauration scolaire avec son coût alimentaire… « un tsunami d’inflation en 2023 est à prévoir. Ensuite, nous prenons en compte le départ de la Gendarmerie et du Trésor public dans les locaux municipaux avec un loyer à la clé. Toutefois, une ajoutons une enveloppe de 250 000 euros en faveur du CCAS », poursuit Sylvie Wiart.
Concernant le chapitre le plus observé, celui de l’investissement, il s’inscrit à 11,68 millions d’euros. « Nous continuons d’investir sur nos grands projets structurants, le centre-ville, le Parc de la Scarpe, le patrimoine historique, et les espaces sportifs et culturels. A ce titre, nous auto-finançons à hauteur de 44% notre investissement, plus un emprunt de 2 millions d’euros. Ce budget 2023 garde le cap de l’investissement pour l’avenir », commente l’adjointe aux finances.
On peut noter que de nombreuses communes du Valenciennois engagent un prêt bancaire, manu militari, face à la hausse des taux financiers. Il ne faut pas être grand clerc pour anticiper que l’intérêt d’un emprunt sera nettement moins pertinent pour une collectivité locale dans un an jour pour jour, prenons le pari sans risque !
« C’est un budget d’une ville en déclin », Eric Renaud
Pour le groupe politique d’opposition emmené par Eric Renaud, le bon résultat 2022 « n’est pas le fait de votre bonne gestion municipale, mais grâce à des phénomènes extérieurs. De plus, nous allons percevoir des dotations d’Etat plus fortes ».
Ensuite, Eric Renaud avance le point de vue de son groupe : « Cet excédent budgétaire 2022 devrait servir à réduire notre fiscalité locale sachant que le particulier va payer 7,1% en plus en 2023. De plus, ce ne sont pas seulement les propriétaires qui vont s’acquitter de cette hausse, mais également les locataires pour lesquels le loyer va augmenter, comme la hausse de la TEOM ».
Après son intervention, Alain Bocquet sort la bonne boites à archives, il cite l’ancien adjoint aux finances, Eric Renaud insistant sur la nécessité impérieuse de ne jamais baisser une fiscalité locale afin d’assurer les services à la population… ! « Je ne renie en rien mes propos à l’époque, mais vous pourriez aller chercher 900 000 euros de taxes sur les eaux minérales contre 300 000 prévus en 2023 », répond Eric Renaud. D’ailleurs, compte tenu que la 1ère adjointe, Nelly …., indique « que 50% de la taxe foncière bâtie est payée par des entreprises », l’autre paramètre mis en exergue par Eric Renaud n’est pas anodin. En effet, la CVAE, pour faire simple l’impôt de production, va disparaître en deux ans (2023/2024). En clair, l’entreprise des « Eaux minérales de St-Amand », un groupe international, a les moyens de payer une surtaxe, le fameux « droit de bouchon » boosté.
Après la Covid et le moins coûtant au résultat de clôture 2021, les bons résultats du Pasino en 2022, malgré « un auto satisfecit, notre épargne net fond comme neige au soleil (comme toutes les collectivités locales du Valenciennois). Je suis très pessimiste sur les recettes du Pasino en 2023, 2024, et 2025, on peut tabler sur -25%. C’est un budget de déclin », conclut Eric Renaud.
Lors de l’intervention de Fabien Roussel, élu au Conseil municipal, aborde également le sujet du Groupe international possédant les Eaux minérales de St-Amand. « Cette entreprise connaît déjà une baisse de la consommation de l’eau minérale. Le gouvernement a prévu de supprimer le plastique intégralement d’ici 2040, alors que le plastique utilisé est 100% recyclé aujourd’hui. L’entreprise va devoir s’adapter à cette mesure, et comme les autres dans le domaine, mais ils ne savent pas comment faire à ce stade ». Aujourd’hui, la production en bouteille de verre n’est pas assurée sur la cité thermale.
Sur ce point, il est assez surprenant qu’aucun élu, ni majorité, ni opposition, n’a évoqué une tendance de fond, toutes catégories sociales confondues, et plus encore chez les jeunes. On consomme beaucoup beaucoup moins d’eau minérale, on filtre avec du charbon, des billes, un adoucisseur, et tout cela s’accompagne par une vague de décarbonatation de l’eau en France. En clair, la consommation d’eau minérale va chuter dans des proportions à l’instar de la publicité papier dans votre boîte aux lettres. La cité thermale doit se préparer dans les prochains mandats à ne plus intégrer cette recette dans ses prévisions budgétaires. Enfin, l’inflation galopante accentue le phénomène, c’est entre 100 et 200 euros par mois d’économie pour une famille. Gouverner… local, c’est prévoir !
« Je vais demander le contrôle de légalité à la Sous-Préfecture », Eric Castelain
En premier lieu, Eric Castelain s’insurge sur la forme et particulièrement les conditions de la réunion de la dernière « commission des finances. Je sais que tout est plié d’avance, mais son organisation est inacceptable. Notre avis (à défaut d’être suivi) n’est pas pris en compte. A ce titre, je vais demander le contrôle de légalité à la Sous-Préfecture, car la tenue de cette commission des finances est pour moi entachée d’une irrégularité substantielle ».
Ensuite, il note les fonds supplémentaires pour la commune « un filet de sécurité tombé le 26 décembre, 1.112.000 euros, plus les bons résultats du Pasino. Vous pouvez donc restituer cet argent aux Amandinois à travers une baisse de la fiscalité locale ».
Il est évident que compte tenu du prévisionnel de hausse des impôts fonciers au niveau de l’Etat, 7,1% en 2023, du même registre en 2024, 2025, et 2026, la question n’a pas fini de se poser dans les collectivités locales françaises. Comme Eric Renaud, il demande à la majorité « de réduire le taux de fiscalité de la taxe foncière bâti et non bâti. D’ailleurs, pour le non bâti, vous auriez pu soutenir les agriculteurs de la commune ».
La majorité répond par sa 1ère adjointe : « Nous avons analysé la baisse de taux nécessaire afin d’absorber cette hausse de la part de l’Etat. Nous devrions baisser notre taux de 3,5% avec une perte fiscale de 930 000 euros. Au final, cela générerait une économie de 20 euros par mois pour chaque contribuable propriétaire ».
« 20 euros par mois, cela se prend », Guillaume Florquin
Sur ce trait, Guillaume Florquin répond « compte tenu de l’inflation actuelle, 20 euros par mois, cela se prend. Ensuite, un prêt de 2 millions d’euros est-il utile dans ces conditions financières ? Enfin, je note une baisse de 7% de la solidarité communautaire, notre ville est-elle reléguée à la Porte du Hainaut ? C’est pourquoi, nous ne voterons pas ce budget primitif ».
« On ne peut pas répondre aux besoins sans mettre la commune sur la paille », Fabien Roussel
Pour le député de la 20ème circonscription, le constat concernant le budget de l’Etat n’est d’abord pas au niveau. « Ni le Budget voté par l’Assemblée nationale, ni au Sénat, (via le 49-3) ne répond à ces crises. L’Etat n’aide pas assez les communes. Que va-t-il rester aux communes demain ? On ne peut pas répondre aux besoins sans mettre la collectivité locale sur la paille ! Si nous baissons les impôts, que se passe-t-il demain si la situation actuelle ne s’améliore pas, voire s’aggrave ? », explique Fabien Roussel.
Trois faits incontestables à mentionner pour éclairer ces réflexions, l’Etat a redécouvert toute l’utilité de l’échelon communal durant la crise sanitaire. Finalement, à portée de baffes, mais également de solidarité est essentiel. Ensuite, la cité thermale est reconnue pour sa position atypique, avec un budget plus conséquent que toutes les villes de même strate et par suite d’une gamme de services à l’administré au dessus de la moyenne, il suffit de circuler un peu dans le Valenciennois pour le constater. Enfin, personne, absolument personne, ne peut prédire la suite des événements nationaux et mondiaux, guerre en Ukraine…, dans les 6 prochains mois. Oui, l’incertitude est totale de facto.
Ensuite, l’élu s’insurge sur « les 8 milliards de cadeaux aux entreprises à travers la suppression de la CVAE 2023/2024 (in fine toujours de la trésorerie en moins à sortir). Là, je fais la différence entre les TPE et PME dans une grande souffrance, tant mieux pour elles, et les grands groupes industriels ».
Au final, Fabien Roussel juge « ce budget solide, sérieux, et surtout protège les administrés ».
« Comment fait-on ? », Alain Bocquet
Pour l’édile, la défense de son budget s’appuie sur un pragmatisme de terrain. Bien sûr, l’Etat n’est pas exempté de responsabilité. « L’Etat utilise les communes comme variable d’ajustement de sa fiscalité et de ses dettes », commente Alain Bocquet. Après cela, il faut bien bâtir un budget communal. Face aux demandes de l’opposition, il interpelle ces dernières « comment fait-on ? ». En clair, que se passe-t-il si la situation se dégrade ? Une baisse des services qui ne manquerait pas d’être pointé du doigt par l’opposition, une réduction des investissements comme d’autres communes du Valenciennois… en résumé, nous sommes dans une équation impossible à résoudre avec un raisonnement simpliste. Le choix du temps court pour soutenir le pouvoir d’achat de ses administrés ou celui du temps long afin de maintenir un niveau de services attendu par ces mêmes administrés, choix cornélien, et particulièrement politique.
Sur un point financier, Eric Renaud relance le maire sur la TEOM « pourquoi n’avez-vous pas esté en justice pour récupérer 6 millions d’euros prélevés aux Amandinois ». L’issue de la procédure contre La Porte du Hainaut, initiée par Eric Renaud, contre la mise en oeuvre d’une taxe sur les ordures ménagères sera sans doute connue durant l’année 2023.
Le budget primitif a été voté par la majorité municipale et l’opposition dans sa diversité a voté contre.
Les travaux démarrent…
Le moment était attendu, mais les travaux de transformation lourde du Parc de la Scarpe vont démarrer en 2023. Patrick Dufour, en charge des travaux, expose le plan de travaux. « Nous allons démarrer en mars 2023 avec un travail sur le parvis, puis l’allée principale allant jusqu’au kiosque. Cette 1ère passe sera finie avant le 14 juillet. Ce dossier bénéficie d’un financement du Conseil départemental, de La Porte du Hainaut, et de la ville ».
Autre chantier prévisionnel à travers le fameux Pont du Moulin Blanc où des travaux vont démarrer prochainement pour un montant de 2,4 millions d’euros, financés par le Conseil départemental, la SNCF et la commune pour une petite partie. On note, comme toujours, que c’est à l’issue d’une catastrophe (le Pont de Gênes) que la SNCF a (enfin) accepté d’envisager une rénovation lourde. En Anglais, une catastrophe naturelle se traduit par « Act of God », mais en en l’espèce la main de la SNCF est belle et bien en cause !
La politique associative
L’adjointe aux sports a défendu la politique communale à l’endroit des association sportives. « Nous n’avons pas diminué notre soutien aux associations sportives même pendant la Covid. D’ailleurs, nous voyons depuis septembre un redémarrage à la hausse avec des niveaux d’adhérents comme en 2019. C’est un engagement fort de la ville. J’assiste personnellement ou les techniciens du service à chaque Assemblée générale », commente Cécile Novak-Grasso.
Eric Renaud reprend l’élu : « Il faut remettre à plat cette grille de lecture des critères d’attributions de subventions. Ensuite, les associations sportives sont loin d’êtres contentes comme vous l’indiquez ». La réponse fuse par l’adjointe aux sports « vous assistez à quelques AG seulement, on peut les compter sur les doigts d’une main ».
D’un point de vue plus large sur le volet associatif, la 1ère adjointe « admet que je suis d’accord avec Eric Renaud. Notre travail en 2023 sera de repenser cette grille de lecture des subventions aux associations (pour le budget 2024) ».
Les avancées…
Sur le volet financier du Pont patrimonial sur la Grand Place, le maire évoque un financement conséquent : 400 000 € de la ville, 400 000 € du Département, 400 000 euros de la Région, 300 000 € à ce stade de Mécénat, et « 250 000 € de l’Etat que j’ai obtenu auprès de l’ancienne ministre de la Culture, Roselyne Bachelot. Sa promesse a été suivie par ses services et mis en oeuvre par le nouveau Préfet de Région, ancien Directeur de Cabinet de Mme Bachelot. Ensuite, nous attendons la visite de Stéphane Bern pour la Fondation du Patrimoine au printemps prochain », commente Fabien Roussel.
Enfin, on n’est jamais à l’abri d’une bonne nouvelle, mais le député annonce « qu’un équipement médical IRM sera autorisé sur le Centre Hospitalier de Saint-Amand en 2024 en partenariat avec la médecine privée. Cela va renforcer le plateau technique de notre hôpital public avec des équipes spécialisées locales (communiqué de presse ci-joint)».
Daniel Carlier