Une Présidence française européenne numérique et climatique
Chemin faisant après le passage du noir au vert, Clément Beaune, Secrétaire d’Etat chargé des affaires européennes, est venu sur l’ancienne friche Vallourec à Anzin. Sur cet ancien site industriel, cet autre symbole avec un acier malmené s’est converti au numérique à travers une pépite comme la Serre Numérique, inaugurée en avril 2015, où Rubika irrigue ses enseignements dans les domaines de la création numérique, du jeu vidéo, et du design.
Clément Beaune : « Une même règle, les mêmes normes pour l’accès à un marché européen »
Accueilli sur le parvis de la Serre Numérique par Bruno Fontaine, président de la CCI Grand Hainaut, Clément Beaune est venu à la rencontre d’une transformation remarquable. D’ailleurs, en propos liminaire, l’homme fort de la chambre consulaire rappelle que cette idée du grand virage vient de loin.
Succédant à une période où le textile et la dentelle construisirent la renommée de ce territoire, le charbon et l’acier ont « assuré pendant deux siècles la richesse du Valenciennois. Néanmoins, le déclin a commencé à s’amorcer dès les années 1960, puis en 1980 avec le départ d’Usinor où nous avons perdu 35 000 emplois. Pourtant, nous avions anticipé ce déclin avec la réalisation d’une autoroute gratuite, un projet financé à 88% par l’Etat, 4% la commune, et 8% par la CCI du Valenciennois, un coup de génie à l’époque », commente Bruno Fontaine.
Pour sa part, Jean-Noël Verfaillie, maire de Marly et Président de Transalley, introduit le sujet économique du présent et de l’avenir. Il met en avant les atouts du moment avec un port fluvial intérieur de premier plan en lien constant avec les Ports d’Anvers et de Rotterdam. Ensuite, il met en exergue des difficultés administratives sur le volet ferroviaire : « Les délais de traitement des terminaux embranchés sont très longs. Des entreprises doivent abandonner le transport en fret ferroviaire faute de réponses. Ensuite (comme Béatrice Descamps), nous avons l’enjeu d’une concrétisation de la ligne de fret ferroviaire entre Valenciennes et Mons ».
Sur le volet énergétique, le territoire s’engage « sur le mixte énergétique. Nous sommes très en pointe sur l’hydrogène et la production d’électricité », ajoute le maire de Marly.
A son tour Stephan Meuric présente le cluster d’entreprises Transalley : « Autour de deux pôles d’excellence, le ferroviaire et l’automobile, nous avons créé un écosystème, un lieu de promotion des mobilités comme pour une automobile spéciale hydrogène, une mobilité digitale, voire un véhicule PMR ».
« 85% des étudiants en jeux vidéo restent dans cette filière », Stéphane André
En visite dans la salle dédiée au 3è année de Bachelor Jeux Vidéo, le Secrétaire d’Etat a pu échanger avec les étudiants. De la création d’un jeu vidéo ludique à un partenariat avec Thalès, tous les profils se croisent, se mêlent, se cherchent, et parfois se trouvent dans leur création numérique. Les étudiants présents expliquent travailler « sur un jeu vidéo sur les fonds marins ». « C’est la première fois que nous avons ce type de partenariat. Nous avions besoin de quatre étudiants, et ils sont 19 au final », commente Stéphane André, le Directeur de Rubika.
Ensuite, le responsable des écoles consulaires évoquent une évolution dans l’approche des apprenants. « Au début, ils ne juraient que par les grands noms comme Ubisoft, et autres équivalents. Après, ils furent séduits par les studios indépendants. Aujourd’hui, ils se tournent vers l’industrie où le jeu vidéo prend sa place », ajoute Stéphane André.
Le jeu vidéo et les neurosciences
Au sein de ces 17 000 M2, la Serre Numérique abrite également des entreprises en couveuse où sur le chemin du développement. A cet effet, Clément Beaune a écouté la présentation de l’entreprise « Babaoo » en phase de réalisation d’un jeu pour les enfants en lien avec les neurosciences. « Notre cible concerne les enfants de 7 à 11 ans à travers un jeu vidéo non violent. Il est basé sur la remédiation. Ce n’est pas un Brain-Trainer, mais nous associons les neurosciences, un savoir universel avec le jeu vidéo. Nous visons une sortie mondiale, aux U.S.A, en Europe, etc., vers la fin 2022. Bien sûr, suivant la culture des pays, la présentation est différente », commente-t-il.
Ensuite, sa venue au sein de la Serre Numérique s’inscrit à travers « un soutien financier de Valenciennes Métropole, de la région des Hauts-de-France, voire de la BPI. Pendant le 1er confinement, nous avons réussi à lever 4 millions d’euros », explique l’associé et responsable du programme chez Babaoo. Une fois encore, nous voyons que sans les fonds publics, l’innovation resterait à quai.
« Cette reconversion exemplaire », Clément Beaune
A l’issue de cette visite, le Secrétaire d’Etat chargé des Affaires européennes souligne « cette reconversion est exemplaire avec de l’innovation et de la création. Pour autant, nous devons continuer à harmoniser nos règles communes, nos normes européennes ». Sur ce point contraignant souvent vilipendé par le grand public, Clément Beaune trouve une pertinence « car les entreprises dans le numérique en France doivent pouvoir accéder à un marché unique, avec des règles identiques pour les 27, des normes communes. En effet, un concurrent américain a immédiatement accès un marché de 300 millions de personnes, c’est pourquoi un européen peut être tenté de partir de suite outre-atlantique ».
En effet, il faut souligner que les Etats-Unis et la Chine dominent le monde numérique, BIG DATA, capacité des serveurs, etc. Si les deux décident d’un coup de couper l’alimentation européenne, nous sommes dans la noir complet. OVH, basé à Roubaix, notre champion français et européen est petit en taille face à ces pachydermes du numérique. Il est grand temps que l’Europe numérique prenne ses responsabilités, car le parallèle avec le sanitaire est simple. Deux leaders mondiaux peuvent couper notre cordon numérique avec un clic…, et nous serions dans la même situation qu’avec les masques en février 2020 !
Enfin, le Secrétaire d’Etat annonce que la prochaine présidence européenne de la France suivra un fil rouge avec deux thématiques centrales « le modèle climatique et numérique ». Cette Présidence européenne pour six mois, le 01 juillet prochain, tombe opportunément pour le Président de la République, Emmanuel Macron. A cette occasion, pourra-t-il mettre en pratique, peu avant la Présidentielle, son discours européen de la Sorbonne gravé dans le marbre du drapeau de l’Union européenne ?
Daniel Carlier