Dans les utopies de Gwenaelle Allard, les objets ne se meurent plus !
En ce moment, et jusqu’au 23 janvier, c’est sur rendez-vous que nous pouvons venir visiter l’exposition de deux artistes locaux : « Orage d’acier » de Bertrand Lefebvre et « Au travers de mes utopies » de Gwenaëlle Allard à la médiathèque Le quai de Condé-sur-l’Escaut.
L’exposition prévue en novembre a été décalée à janvier, et c’est sur rendez-vous que les spectateurs peuvent venir découvrir le travail de Gwenaelle Allard. Ce concept permet à l’artiste de prendre le temps de discuter avec les personnes venues spécialement pour voir son travail. C’est même un moment privilégié entre l’œuvre et le spectateur. Ce mercredi 13 janvier, c’est la peintre Onnaingoise, Gwenaëlle Allard, qui était présente pour nous accompagner lors de la visite.
Si cette dernière exprime dans son travail, sa tristesse et son désarroi à jeter, à laisser mourir un objet, elle partage, dans la rencontre avec son public, un flot de couleurs et de joie et ses yeux qui pétillent, nous font oublier, que le sourire est dissimulé.
Le temps passe très vite en sa présence et ses images de fragments d’objets prennent vie. L’exposition à pour point de départ la découverte d’une épave sur la presqu’île de Crozon, puis une déambulation de 300 km essentiellement en Bretagne, pour approcher au plus profond de la matière de cet objet abandonné aux aléas du temps et des marées.
Explorée sous toutes ses coutures, cette épave est déclinée dans 14 tableaux (la série initiale est composée de 17 tableaux), du même format, dans des coloris à la fois terreux et brillant. La rouille de l’épave est-elle représentée ou utilisée en tant que matière ?
On voit immédiatement dans ses images que le temps, son écoulement à une grande importance. Ce temps, que l’artiste n’a pas perdue pendant le confinement mais qu’elle a pu mettre à profit pour développer son idée. Son médium de prédilection, l’huile, permet de prendre le temps, de laisser doucement sécher la surface de la toile, de laisser l’image se figer, mais aussi d’avoir la possibilité de la retoucher, longtemps.
Elle se définit comme peintre mais la photographie a également une grande importance dans son travail : ses propres photographies, mais aussi des photographies qu’elle s’est approprié. Notamment dans une dernière peinture « Les bassines » qui sont inspirées d’une photographie de Seb Lambusta. Ce dernier avait publié son image dans le groupe « Valenciennes et ses alentours en photographie », groupe coordonné par Jean Marie Desfossez qui l’a d’ailleurs accompagné pour écrire un texte qui nous est offert lors de l’exposition.
Quand on lui demande qui aurait pu l’inspirer, elle parle tout d’abord, sans hésiter, de son professeur de collège qui l’a profondément marqué en classe de sixième, Mr Budzik. Elle a pu découvrir, grâce à lui, l’art abstrait et plus particulièrement le couple Delaunnay dont elle parle avec passion et inspiration.
Sa série, « A travers de mes utopies », tend d’ailleurs à faire disparaitre l’objet et certaines toiles semblent presque abstraites. Certaines images nous approchent de plus en plus de l’objet, qu’on ne peut même plus qualifier de tel, tant la peinture, sa texture, vient en avant, fait disparaitre l’objet lui-même.
On ne peut que s’imaginer que son expérience dans le domaine de l’optique lui on apprit à « regarder ». Elle confie sa grande sensibilité qui est la clef pour vraiment savoir représenter. « Avoir du talent n’est pas suffisant, il faut avant tout savoir capturer l’essence des choses ».
Ce n’est pas tant l’objet qui semble l’intéresser, mais plutôt son histoire, sa vie. Des objets souvent d’acier, de rouille, des objets qui peuvent vivre avec le temps, l’eau les éléments. Comme la peinture qu’elle utilise, l’huile, la térébenthine, que l’artiste qualifie de matériaux vivants. D’ailleurs, deux de ses dernières toiles exposées ne sont pas encore complètement sèches.
L’exposition est visible jusqu’au 23 janvier sur réservation, aux heures d’ouverture de la médiathèque. L’artiste est assez présente sur les réseaux sociaux et précise régulièrement ses heures de présence.
Même si ces images nous parlent, la présence charismatique de Gwenaelle Allard nous fait oublier quelques instants, cette période pleine d’incertitude. La beauté des objets, elle, est une certitude.
Jane Huvelle