(Onnaing) L’écologie de terrain sujet à interprétation
Sur la commune d’Onnaing, le projet d’aménagement du Centre ville fait polémique entre les riverains et la majorité municipale. Ecocide d’un coté, indispensable densification urbaine de l’autre, deux visions d’un développement d’une commune de 8870 habitants avec une bataille juridique à la clé. Retour sur un (vieux) projet d’aménagement local avec le maire Xavier Jouanin, et Pascale Brancato, fer de lance de cette opposition au dit projet.
L’écologie urbaine, où et comment ?
Comme pour chaque aménagement urbain, l’origine du dossier est à prendre en compte. En l’espèce, sous la houlette de Denise Cappelle, ancienne maire de la commune, une première mouture du projet fut portée par la ville. Cette dernière a fait appel à l’EPF (Etablissement Public Foncier) pour l’acquisition du foncier en février 2013. L’EPF a de facto acheté le bâti de l’ancienne entreprise (boucherie), et en l’espèce un terrain arrière arboré.
A travers une première convention avec l’EPF passée au Conseil municipal pour 5 ans, la ville s’était donc positionnée pour un projet de reprise d’un délaissé vert, rare par son périmètre et son volet central. Cette convention avec l’EPF fut prolongée en avril 2018 jusqu’au 19 février 2021. Cette date butoir imposera à la collectivité locale de verser son dû en sortie de convention (démarche classique) pour un montant de 520 000 euros, tout en sachant qu’un bâtiment sur ce site sera revendu par la municipalité venant en diminution du coût d’acquisition.
Pour situer l’ampleur du sujet, le bailleur social « Habitat Hauts-de-France » a bénéficié d’un permis de construire (visuel permis) le 02 novembre 2020 pour un aménagement de 4 625 M2 avec 32 logements à la clé, un parking « et une bande verte de 3 mètres en retrait par rapport au projet initial. Le coût total pour l’opérateur s’élève à 5 millions d’euros », précise le maire. Pour sa part, la ville assumerait la création d’un espace vert de 1120 m2 et d’une halle couverte grâce « une subvention d’un millions d’euros de la région relative à la redynamisation des centres-bourgs, et un investissement d’un millions d’euros pour les espaces communaux », commente le maire. A ces deux fonds s’ajoute un fonds d’état fléché « Petites villes de demain », lancé le 1er octobre 2020, permettant aux villes éligibles de moins de 20 000 habitants de bénéficier d’un soutien spécifique de l’État pour mettre en œuvre leurs projets de revitalisation.
« C’est un écocide », Pascale Brancato
Deux études environnementales ont été lancées sur ce projet par la municipalité. Le cabinet Taw Environnement mentionne dans un courrier adressé la collectivité locale le 30 décembre 2020 : « Bien que ces trois arbres soient de grande taille et âgés, ils ne sont pas des individus d’espèces protégées, ni d’espèces patrimoniales. De plus, ces 3 espèces sont communes régionalement et la destruction de ces individus ne portera pas atteinte à la conservation de ces espèces ».
Pour l’association « L’Arbre d’Or » le dit projet rue Mirabeau, rue Zola, rue Dolet, voire avenue Jean Jaurès « est un écocide » compte tenu de la qualité de l’espace arboré, notamment « un Châtaigner centenaire de 3m50 de circonférence, et 18 mètres de haut. Il y a une série d’arbres centenaires en centre-ville sur un ensemble arboré remarquable (Visuel PDF) et châtaigner monumental (visuel PDF) », précise Pascale Brancato. Seul point de convergence, la présence d’un terrain délaissé de 4 625 m2 en plein coeur de ville est une aberration, un site où la nature a repris ses droits sans être pour autant un site vert naturel. « Pourquoi la création d’un jardin public en centre-ville n’est pas choisi par la municipalité. C’est un poumon vert en plein coeur de la commune juste à coté de l’église ». L’association « Nord Nature Environnement » confirme sa surprise concernant la suppression d’une zone boisée en centre-ville.
Ensuite, l’association « L’Arbre d’or » est furibonde considérant un manque d’informations de la municipalité sur ce dossier urbain. « J’ai pris connaissance du projet lorsqu’un géomètre expert est venu prendre des mesures devant chez moi. Ce projet s’est fait en catimini, aucune réunion publique n’a eu lieu, aucun dialogue n’est possible avec le maire », assène-t-elle. Le maire répond en brandissant son programme 2020-2026 où ce projet d’aménagement de centre-ville figure en bonne place (Page 4 PDF ci-joint).
Certes, le grand public lit trop peu les programmes des candidats, tout en rappelant l’historique en début d’article de ce projet. De plus, la liste de Xavier Jouanin fut élue au 1er tour sur le dit programme, rien n’était caché sur le plan factuel. Pascale Brancato tient à préciser que cette revendication « n’est pas du tout politique même si je sais que c’est un enjeu politique ». De son coté, le premier magistrat souligne que malgré ce temps sanitaire « je continue mes rencontres dans les quartiers et mes permanences dans les conditions sanitaires requises », commente-t-il.
« Un intérêt individuel face à l’intérêt collectif », Xavier Jouanin
Force est de constater que les trottoirs sont trop étroits, une poussette ou des PMR peuvent difficilement déambuler dans cette rue. Les bus passent également difficilement avec vidéo à appui. « Il n’y a pas d’autres solutions pour le passage des bus », précise le maire même si durant une phase de travaux une déviation fut mise en place. Dans cette optique, le dit aménagement avec une bande verte devrait améliorer cette sécurité routière si le plan d’aménagement est respecté sur les visuels fournis.
Sur la polémique de la présence de logements sociaux, Pascale Brancato crie avec force « je n’ai rien contre le logement social, mais ici nous parlons de la destruction d’un espace vert en centre-ville ». Une affirmation qui n’a pas convaincu le maire d’un riverain qui refuse la présence de logement social devant chez elle. « En centre-ville, c’est quasi la seule option pour la réalisation de logements dans notre commune. Je comprends certains riverains, mais nous sommes typiquement en présence d’un intérêt individuel face à l’intérêt collectif », précise le maire.
« Nous irons jusqu’au bout des procédures », Pascale Brancato
Loin d’en démordre, la porte parole de l’association affiche clairement la feuille de route juridique. « Nous avons effectué un recours devant le Tribunal administratif de Lille dans les délais impartis. Si l’association est déboutée en 1ère instance, nous irons jusqu’au bout des procédures », précise Pascale Brancato.
Cette bataille écartèle la définition de l’écologie urbaine. En effet, un pilier du développement durable impose l’abandon de l’étalement urbain, et par définition la densification urbaine devient le « La » d’un aménagement écologique urbain, et raisonné. De l’autre, la présence arboré en ville devient plus que nécessaire au titre d’îlot de fraicheur, voire d’un réchauffement climatique inévitable.
Le maire se défend bec et ongles sur le geste écologique. « Nous réalisons un parc de 1020 M2 au sein de ce projet. De plus, le bailleur va arborer les abords de ce programme limité, à notre demande, à R+2 », indique Xavier Jouanin en citant d’autres aménagements écologiques (sujet à paraître jeudi sur les autres projets de la commune).
« Deux pétitionnaires sur 5 nous ont vendu un terrain sur le dit projet », Xavier Jouanin
Du coté de la municipalité, le maire affirme que « sur les 5 pétitionnaires. Deux d’entre eux ont vendu un bout de terrain sans lesquels le dossier était impossible, et aujourd’hui ils sont contre ce projet.. ! ». Si cette information est vérifiée, il serait intéressant de connaître le niveau d’informations de ces personnes au moment de la dite vente. Ou elle était claire sur les tenants et aboutissants ce qui est la norme sans oublier que ce projet fut initié en 2012/2013 ou elle était parcellaire… C’est clairement un point de Droit lourd d’un côté ou de l’autre.
Enfin, sur la perte de valeur foncière supposée par les riverains, il faudrait revoir l’estimation en sortie de projet « compte tenu qu’un espace où prolifère les rats n’est pas forcément très positif pour un bien immobilier ». Une évaluation des domaines avant comme après serait effectivement intéressante à cet effet…, si ce projet de logements sociaux voit le jour !
(Sujet programme Cuvinot à paraître ce jeudi)
Daniel Carlier