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(CHV) R.Bourret : « On craint énormément ce déconfinement »

Plan blanc depuis le 15 mars, début avril avec les 1er cas Covid au CHV, le point du jour avec un oeil dans le rétro, et l’autre vers le prochain déconfinement (relatif) dans le Nord. Entretien avec Rodolphe Bourret, Directeur général du Centre Hospitalier de Valenciennes.

Rodolphe Bourret : « Une filière Covid 7/7 »

Si la carte de France présentée par le Professeur Salomon, au 30 avril 2020, indique une circulation du virus légère dans le Nord, sa capacité hospitalière demeure un élément clé de cette sortie de confinement.

Déjà, il faut recadrer cette organisation du CHV. « Le Plan Blanc depuis le 15 mars au CHV nous oblige à traiter la cause de ce plan en priorité, le Covid-19. Bien sûr, ne sont pas exclues les urgences vitales, les pathologies où l’attente diminue vos chances, AVC, cancer, diabète, etc. Toutefois, deux filières ont été mises en place, l’une propre, et l’autre Covid. Donc, en temps normal d’ouverture au public au CHV, sur 5 200 salariés, vous avez 4000 salariés présents. Là, avec le CHV fermé au public, mais avec ses deux filières (propre et Covid-19), nous avons entre 3 200 et 3 400 salariés présents sur site. De fait, malgré une rotation des effectifs, les salariés (soignants ou pas) sont épuisés. Contrairement à une gestion habituelle avec des interventions 5/7, et seulement des hospitalisations le samedi/dimanche, la filière Covid est active 7/7 avec un temps de prise en charge d’un patient Covid nettement supérieur à la voie normale », entame Rodolphe Bourret

« 104 patients Covid au jeudi 30 avril », Rodolphe Bourret

« Depuis un mois, nous avons accueilli 1 300 patients Covid au CHV. Le temps de séjour est variable suivant l’âge, moins de 50 ans durant 4 et 5 jours, plus de 50 ans 6 à 7 jours. Nous observons une toux légère au début, puis vers le 6ème jour, un effet rebond avec une pathologie respiratoire très sérieuse. Dans cette filière Covid, les patients sont répartis dans une unité de soins continus (40 lits) ou dans des lits critiques (réanimation/42 lits CHV). Nous avons toujours la capacité hospitalière d’accueillir des malades Covid au CHV », entame Rodolphe Bourret.

Ensuite, le point d’étape fin avril ouvre une fenêtre d’optimisme dans le Valenciennois « nous avons 104 patients Covid ce 30 avril au CHV, contre 107 le 29 avril, 120 le 28 avril, voire 140 la semaine dernière », souligne Rodolphe Bourret.

Au niveau de la mortalité, « certains jours passent sans décès, mais cela peut aller au maximum à 4 décès par jour, 35% de patients de plus de 75 ans, 35% patients entre 60 et 75 ans, et le reste plus jeune », précise-t-il.

« Nous verrons  fin mai si nous connaîtrons 2ème vague », Rodolphe Bourret

Fort de ces propos liminaires, le lundi 11 mai constitue une date redoutée au sein de l’Hôpital public de référence dans le Grand Hainaut. « On craint énormément ce déconfinement du 11 mai. Certes, nous observons une baisse des cas Covid aux urgences. Sur 220 patients en passage aux urgences, nous avions 50% de Covid habituellement, ce chiffre baisse à 30% dernièrement. Nous verrons fin mai si nous connaîtrons une 2ème vague compte tenu du temps d’incubation, il y aura véritablement une phase critique de deux semaines », précise le directeur du CHV.

Le plus dangereux serait donc l’accumulation d’un retour brutal de la filière classique avec une 2ème vague de Covid-19. En l’espèce, la prise en charge serait extrêmement compliquée avec un personnel déjà en alerte (quasi) permanente depuis le déclenchement du Plan Blanc.

« La peur est mauvaise conseillère », Rodolphe Bourret

Autre paramètre extrêmement important, les pathologies « classiques » sont de retour au CHV. « Nous voyons arriver des pathologies (hors Covid-19). dans un état très dégradé au CHV, voire avec une perte de chance totale. Il est impératif de consulter son médecin, de faire le 15… pour vous faire soigner. N’attendez pas ! La peur est mauvaise conseillère. Nos personnels sont parfaitement protégés. Vous craignez beaucoup moins d’attraper le COVID au CHV que dans un supermarché », explique-t-il.

Si vous ajoutez cette peur nationale de l’enceinte hospitalière avec une résistance endémique à la douleur dans les populations du Bassin minier, vous obtenez une addition catastrophique !

Au niveau régional

« Les hôpitaux publics, et privés, en capacité de réanimation ne sont pas à saturation dans la région Hauts-de-France. Nous sommes à 65% », précise le directeur du CHV.

Ce chiffre est intéressant à la lumière des différentes cartes (provisoires) présentées ce jeudi 30 avril. En effet, le virus circule légèrement dans le Nord, la capacité hospitalière en réanimation n’est pas à saturation tout en étant très très forte, le 3ème critère est donc très faible. En l’occurrence, c’est celui de notre capacité à tester la population du département le plus dense de France, pas franchement un scoop !

Donc, les messages du Directeur du CHV sont simples, mais résonnent comme un avertissement. Restez confiner jusqu’au 11 mai, soyez très respectueux des consignes dans cette 1ère phase de déconfinement jusque fin mai, et n’oubliez pas de vous faire soigner si vous avez une pathologie sérieuse .

Daniel Carlier

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