Amandinois

Yoann Zakrzewski, infirmier libéral en guerre !

Face à cette pandémie du Coronavirus à travers la planète, les acteurs de la santé sont au premier rang conjuguant à la fois une nécessité de service au public et un risque personnel pris au quotidien. Entretien avec un infirmier libéral sur la commune de Raismes, Yoann Zakrzewski.

Yoann Zakrzewski : « Nous n’avons pas assez de masques ! »

Yoann Zakrzewski, 44 ans, est infirmier libéral depuis 2003. Installé d’abord sur la commune d’Aubry-du-Hainaut, il exerce depuis 2019 sur Raismes. « J’ai 80 visites par jour, mais parfois deux fois le même patient dans la journée. Mes interventions sont uniquement des actes de soins, chimiothérapie à domicile, insuline, pansements courants notamment pour les hospitalisations de jour de retour à leur domicile, mais également la distribution de médicaments pour les personnes en situation de troubles cognitifs », explique Yohan Zakrzewski.

Bien sûr, les gestes barrières sont inhérents à la pratique de ces métiers, les professionnels n’ont pas attendu les recommandations de l’Etat. Par contre, la mise d’un masque est toute récente. « Je mets un masque depuis le samedi 14 mars. Mes patients n’ont pas été surpris, ils sont même un peu rassurés, car je suis très exposé », ajoute-t-il.

Sur des cas de Covid-19, il ne peut quantifier cette épidémie. « A cette heure, j’ai des patients avec des soupçons de grippe, angine, mais comme nous n’avons pas assez de test (en France), il est impossible de le savoir en l’absence de symptômes plus graves », ajoute-il.

Par contre, le ressenti comme pour tout événement extraordinaire est amplifié. « Ils sont tous très inquiets. Le climat est très anxiogène. De plus, des tas de fausses informations circulent », poursuit-il.

« Seulement 18 masques délivrés par la pharmacie hier soir (mercredi 17 mars) », Yoann Zakrzewski

Le problème est que le nombre de masques n’est pas suffisant pour les professionnels en contact direct avec les patients hors milieu hospitalier. « J’ai eu un stock de départ rapidement épuisé. Ensuite, j’ai pu trouver une source d’approvisionnement temporaire déjà utilisée. Hier, j’ai pu récupérer 18 masques pour cette semaine, soit moins de 3 par jour, alors qu’il m’en faudrait le double. Les infirmiers sont très exposés », souligne-t-il.

Pour illustrer cette carence nationale, il évoque des interruptions de services sur son secteur : « L’arrêt de certaines structures d’aide à domicile où les personnels refusent de se déplacer chez les habitants faute de masques, elles interviennent généralement pour les les toilettes, les courses, le ménage… d’où un sentiment d’isolement encore plus prononcé chez mes patients ».

« J’ai fait une demande à l’ordre des infirmiers », Yoann Zakrzewski

Compte tenu que les opérations non-essentielles sont reportées dans le public, et le privé devrait suivre, les actes de soins post-hospitalisation pourraient diminuer dès la semaine prochaine. Dans cette optique « je me suis proposé auprès de l’Ordre des infirmiers, dans des plages horaires libérées, pour intervenir sur d’autres secteurs en tension », indique l’infirmier.

Derrière le professionnel, vous avez une famille dont le conjoint travaille également dans le domaine médical, la problématique de la prise en charge des enfants est de facto omniprésente. « Certes, nous avons les enfants à l’école comme les autres professionnels de santé, mais que pouvons nous faire à 17h, voire le mercredi, car il devient impossible de confier ses enfants aux parents, grands-parents… », déclare Yoann Zakrzewski.

Voilà le quotidien d’un acteur de santé de premier rang, comme les médecins de ville et de campagne, pour lequel l’activité au jour le jour se décline un peu dans le brouillard londonien. « Je pense que le PIC du Covid-19 serai atteint dans 10 à 12 jours », conclut-il. Rejoignant les propos du Ministre de la santé, cette ligne d’horizon sanitaire laisse augurer d’un moment où le temps s’arrête, seule la mission compte… durant une période de guerre !

Infos sur la durée de validité sanitaire d’un masque (document ci-joint).

Daniel Carlier

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