Territoire

L’IRMA fiscal souffle encore sur la finance mondiale !

Le 08 septembre 2016, Alain et Eric Bocquet lançaient leur livre Sans Domicile Fisc. Un OVNI dans cet univers lisse où le discours sur les aléas des flux de capitaux est un tabou, une chose entendue, inaccessible pour la pensée du commun des mortels. Retour avec les auteurs après ce succès en librairie…. !

(Pierre Gaumeton, la plume indispensable de cet ouvrage, Alain Bocquet, et Eric Bocquet)

Alain et Eric Bocquet : «  Nous avons eu l’impression d’être utiles ! »

Un an après cette sortie du livre SDF, le bilan est conséquent : 64 débats publics, 8 911 personnes présentes à ces derniers, 71 villes avec une manifestation presse ou débats voire dédicaces, au sein de 37 départements, et enfin près de 11 000 exemplaires du livre SDF vendus. Un chiffre à mettre en parallèle avec la kyrielle des sorties des livres politiques dont le record de faiblesse est Christine Boutin avec 38 exemplaires. Cette vente est de fait un beau succès «  et encore des dates programmées jusqu’à la fin de l’année, notamment au Salon du Livre des lanceurs d’alerte début décembre 2017. Nous avons reçu un excellent accueil dans la presse régionale partout où nous sommes passés, et même un article dans les Echos », précise Alain Bocquet.

Le plus important dans ce livre dénonçant les dérives de la finance mondiale réside dans la réception du message. «  Nous avons eu l’impression d’être utiles ! Le plus frappant pour nous était l’état de sidération des auditeurs dans les débats publics. Ensuite, la compréhension que le politique pouvaient prendre des décisions ! », déclare Eric Bocquet.

Clairement, l’évitement fiscal à une conséquence directe sur notre cohésion sociale. Qu’on se le dise, les tribulations mondiales des capitaux ne sont pas indolores, inodores dans une démocratie telle que la France. C’est dans cet esprit que cet ouvrage SDF oeuvre dans le bon sens, la meilleure compréhension d’une comète fiscale qui ne passe pas à 300 millions de km, mais touche au quotidien notre capacité sociétale à compter sur l’intervention d’un Etat. Certes, ce dernier ne peut pas être que providence, mais au moins que le consentement à l’impôt soit basé sur une équité sans faille… !

L’impact de ce livre SDF et d’une campagne militante sur le terrain est palpable. « Le CESER (Conseil Economique, Social, et Environnementale Régional) a adopté un rapport sur cette thématique le 18 décembre 2016. Ensuite, l’Assemblée Nationale le 02 février 2017, loi 903, sur le principe d’une COP sur la finance mondiale (http://www.assemblee-nationale.fr/14/ta/ta0903.asp », ajoute Alain Bocquet.

« L’argument qu’un accord vaut mieux qu’un long procès avec les grands groupes n’est plus recevable« , Eric Bocquet

En France, le point le plus tangible est l’avancée sur la fin «  du verrou de Bercy. Un amendement n’est pas passé à 11 voix près. Un vote avec des députés de presque tous les partis politiques de la majorité et de l’opposition. Le sujet peut revenir prochainement lors du débat budgétaire 2018. L’argument qu’un accord vaut mieux qu’un long procès avec les grands groupes n’est plus recevable », assène Eric Bocquet. Tout juste, on ne peut plus accepter la différence de traitement si vous êtes grand ou petit, riche ou pauvre. La prime d’exonération aux règles fiscales pour les multinationales est choquante pour le citoyen français. Nous l’avons remarqué durant la campagne électorale, l’électeur n’accepte plus cet état de fait avec comme seule justificatif l’exception de notoriété, le pouvoir de nuisance en fait. La citoyenneté recule quand l’impunité triomphe de la loi ! « Le politique peut donc agir », poursuit Eric Bocquet.

« Aucune leçon n’a été tirée de la crise de 2008 », Alain Bocquet

La crise financière mondiale en septembre 2008, puis son ricochet économique dévastateur n’a pas poussé les Etats à se protéger, à baliser les règles de la finance mondiale. « Aucune leçon n’a été tirée de la crise de 2008 », souligne Alain Bocquet. D’ailleurs, en France, l’Etat « ne pourrait plus intervenir massivement quitte à creuser le déficit public », précise Eric Bocquet. Effectivement, la dette est tellement massive que le marché ne supporterait plus un bond de la dette publique française, même si aujourd’hui, cette dernière est un produit très prisé sur les marchés financiers.

A ce titre., les acteurs financiers hors bancaires sont toujours là. « Le Shadow-Banking est toujours bien en place. Des produits comme sur les emprunts des étudiants américains font l’objet de spéculation comme la bulle immobilière de 2008. Néanmoins, un première en Europe pourrait se réaliser, l’harmonie fiscale européenne serait déjà une avancée énorme », ajoute Eric Bocquet.

Eric Bocquet est en campagne pour la prochaine élection sénatoriale (liste PCF). Durant celle-ci, il croise Jean-Pierre Bataille (liste de droite pour les sénatoriales) qui lui lance à la volée : « Bravo pour votre combat, moins il y aura de fraudeurs, moins on paiera d’impôts ! ». Cela pourrait être un excellent slogan d’accroche… !

Jacques Toubon, Défenseur des Droits, vient de publier un rapport «  Lutte contre la fraude aux prestations sociales : à quel prix pour les droits des usagers ? » Un sujet éclairant sur le poids de la fraude sociale, évaluée à 677 millions d’euros. En face, les dizaine de milliards d’euros de l’impunité fiscale mondiale qui nous concerne tous !

Cette aventure d’une fratrie a livré quelques anecdotes, un vin de table « Château Cahuzac », une Fiat 500 improbable, un pèlerinage familial également pour les 2 frères au détour de leurs débats publics, un double visage humain face à l’inhumanité de la finance mondiale tueuse d’espérance !

Et pour les lecteurs choqués par l’emploi dans le titre de cet article du nom d’un ouragan dramatique pour la population ultra-marine ; demandez-vous combien d’hôpitaux publics, d’établissements d’urgence sociale, d’écoles, de transports publics, voire de services au sens large du terme… n’ont pas vu le jour grâce à une évasion fiscale mondiale acceptée ? Comptabilisez le nombre de morts aussi !

« Il faut que tout change pour que rien ne change » : livre « Le Guépard », de Giuseppe Tomasi di Lampedusa… presque prémonitoire ce roman… !

Daniel Carlier

Articles Similaires